1^1 Agriculture
Canada
Research Direction générale
Branch de la recherche
Bulletin technique 1991-1 F
Qualité des sols dans le
contexte canadien - 1988
documents d'examen
M * ■ Agriculture
Canada AVR I I3Î5»
Library / Bibliothèque, Ottawa K1A 0C5
630 . 72
C75S
C °li -i
F* >
Canada
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Qualité des sols dans le
contexte canadien - 1988
documents d'examen
Centre de recherches sur les terres
Ottawa (Ontario)
Rédigé par :
S.P. MATHUR et C WANG
Bulletin technique 1991- IF
CRT Contribution N° 89-12
Direction générale de la recherche
Agriculture Canada
1991
On peut oblenir cette publication à l'adresse suivante :
Directeur
Centre de recherches sur les terres
Direction générale de la recherche, Agriculture Canada
Ottawa (Ontario)
K1A0C6
Production du Service aux programmes de recherches
c Ministre des Approvisionnements et Services Canada 1991
N°decat. A54-8/1991-1F
ISBN 0-662-96435-7
Also available in English under the title
Soil quality in the Canadian context - 1988 discussion papers
Illustration de la couverture
l^es points sur la carte indiquent
les établissements de recherches
d'Agric ulture Canada.
TABLE DES MATIERES
N° Titre
Auteur(s)
Pages
Préface
1. Concepts et critères relatifs à la
qualité du sol dans le contexte
de l'Ouest canadien
2. Critères de qualité des sols dans
le contexte de l'Est canadien
3. Critères de qualité des sols
organiques
4. Matière organique et qualité du sol
5. Quelques commentaires sur
la perte ou l'accumulation de
matière organique dans le sol et
effets sur la qualité des sols
6. Proposition d'un système de
classification de la qualité des
sols minéraux pour les terres arables
J.L. Nowland 1
D.F. Acton 2-5
D.R. Coote 6-18
M. Lévesque
S. P. Mathur 19-37
M. Schnitzer 38-57
S. P. Mathur 58-61
C . Wang
D.R. Coote et
D.F. Acton 62-73
- 1 -
PRÉFACE
Ce n'est qu'au cours des trois dernières années que s'est manifestée l'urgence
de surveiller systématiquement la qualité du sol au Canada. Avant cela, on se
préoccupait vaguement du bon état des terres agricoles, que l'on traitait dans
une large mesure par des applications de fertilisants. Des spécialistes de
tous les coins du pays, lors de discussions en vue de mettre sur pied un
programme national de conservation des sols, ont souligné à plusieurs reprises
la nécessité de surveiller la qualité du sol. Avant d'entreprendre un
important programme de surveillance, il est absolument essentiel de définir la
qualité du sol et de bien comprendre que ce terme englobe un certain nombre de
caractéristiques. Il est également important de choisir les éléments-clés qui
peuvent être étudiés, compte tenu des ressources disponibles, et qui sont
essentiels pour la préservation des terres agricoles.
Le concept du développement viable vient à l'esprit. Les articles présentés
ici nous paraissent présenter des bases solides sur lesquelles il serait
possible d'élaborer des programmes dont les générations futures nous sauront
gré.
Le présent rapport traite des critères qui doivent être utilisés pour évaluer
la qualité du sol ainsi que des différences de points de vue selon qu'il
s'agit de l'est ou de l'ouest du pays. Le rapport traite des sols minéraux et
organiques, extrêmement sensibles, bien que de manière différente, aux mauvais
traitements. Un schéma de classification est proposé, comme élément important
pour organiser nos connaissances. Quelques articles traitent du rôle
particulier que joue la matière organique dans les sols - depuis les principes
et composantes de base jusqu'aux divers effets sur les caractéristiques des
sols relativement à leur utilisation en agriculture.
Nous savons pertinemment qu'un rapport de cette taille ne peut pas traiter de
tous les aspects de la qualité du sol. Ainsi, la qualité du sol en ce qui
concerne ses caractéristiques physiques n'a été que survolée à cause du manque
d'information sur le sujet. De plus, le rôle de la structure des sols dans le
maintien des régimes optimaux d'air et d'eau, l'influence de la gestion des
terres sur la qualité des eaux souterraines et de nombreuses questions liées à
la compaction des sols doivent faire l'objet de plus amples recherches.
Malgré ces mises en garde, nous recommandons la lecture de ce rapport à
quiconque désire avoir une vue d'ensemble des nombreux aspects primordiaux de
la qualité du sol pouvant être touchés de façon importante par la gestion des
terres et ayant une importance particulière pour le maintien de nos ressources
alimentaires futures.
John L. Nowland
Directeur intérimaire
Centre de recherches sur les terres
Direction générale de la recherche,
Agriculture Canada
Ottawa
- 2 -
CONCEPTS ET CRITÈRES RELATIFS À LA QUALITÉ DU SOL
DANS LE CONTEXTE DE L'OUEST CANADIEN
DON. F. ACTON
CONCEPTS DE LA QUALITE DU SOL
Tout le monde semble avoir une idée de ce qu'est la qualité du sol, mais
peu de gens en ont une définition précise et concise. Anderson (1983) a
adapté la définition de Leopold (1949) que voici : «La qualité du sol est la
capacité soutenue qu'a un sol d'accepter, d'emmagasiner et de recycler l'eau,
les éléments nutritifs et l'énergie.» D'après lui, un sol de bonne qualité
possède les caractéristiques suivantes : i) une profondeur suffisamment grande
pour permettre l'emmagasinement de l'eau et l'enracinement; ii) des
colloïdes organo-minéraux en quantité suffisante pour conserver l'humidité
et les éléments nutritifs sous diverses formes disponibles pour les plantes;
iii) aucune caractéristique chimique inadéquate, par exemple acidité ou
salinité et iv) un état physique propice à l'infiltration de l'humidité et à
son emmagasinage, à l'aération et au développement des racines. Le sol doit
être capable d'accepter, d'emmagasiner et de recycler l'énergie que renferme
la matière organique, moteur des processus biologiques dans le sol, ainsi que
d'absorber l'énergie dynamique des gouttes de pluie ou des particules de sol
transportées par le vent sans qu'elles emportent le sol.
D'après Anderson (1983), la matière organique est l'une des composantes-
clés de la qualité du sol. Nous savons tous que l'érosion peut facilement
emporter la matière organique, dont la teneur peut varier selon les pratiques
de gestion utilisées.
La qualité du sol et sa productivité sont étroitement liées; il arrive
souvent qu'un changement de l'une entraîne un changement de l'autre. Anderson
et Gregorich (1983) ont identifié quatre conséquences de l'érosion sur la
productivité, donc la qualité du sol : i) perte de la capacité d'emmaga-
sinement de l'eau disponible pour les plantes; ii) perte des éléments
nutritifs pour les plantes, iii) dégradation de la structure du sol et iv)
augmentation de l'hétérogénéité du sol dans un champ.
D'autres chercheurs, notamment Pierre et al. (1982), ont tenté de
quantifier la productivité du sol afin d'évaluer la perte de productivité à
long terme résultant de l'érosion. D'après eux, la nature du sol détermine en
grande partie le rendement des cultures parce que c'est là où croissent les
racines; le climat, la gestion et le potentiel génétique des plantes sont
également importants. En s 'inspirant de Neill (1982), voici les cinq
paramètres du sol que Pierre et al. jugent primordiaux pour la croissance des
racines : capacité de rétention d'eau, densité apparente, aération, pH et
conductivité électrique. Ils ont de plus fait intervenir un facteur de
pondération pour tenir compte des effets de l'épaisseur des couches de sol.
Neill (1982) a posé comme hypothèse que les éléments nutritifs ne limitaient
pas la croissance des plantes.
- 3 -
Meyer et. al. (1985) ont préparé une longue liste de mesures standardisées
permettant de quantifier des facteurs qui ont un effet sur la productivité.
Les propriétés du sol sont les suivantes : a) propriétés physiques : rétention
d'eau, densité apparente, distribution granulométrique, résistance, stabilité
structurale, taux d'infiltration et potentiel de retrait-gonflement, b)
propriétés chimiques : carbone organique, azote total, rapport C:N, nitrate et
ammonium, phosphore organique et inorganique total, capacité d'échange
cationique, taux de saturation en bases, pH et peut-être saturation en
aluminium, soufre, oligoéléments, sels solubles et rapport d'absorption du
sodium, c) propriétés biologiques : indice hétérotrophe, respiration du sol et
d) caractéristiques du relief : degré et longueur de la pente, orientation.
D'après ces auteurs, les expériences de productivité en fonction de l'érosion
doivent également prendre en considération le milieu ambiant, la croissance
des plantes et les particularités de la gestion.
Renard et Follett (1985) ont identifié les propriétés du sol utilisées
dans le modèle de calcul de l'impact de l'érosion sur la productivité (EPIC)
et fourni certaines directives concernant les expériences de productivité ou
d' érosion.
Un rapport anonyme et non daté : «Soil Quality Criteria for
Agriculture» (Critères de la qualité du sol pour l'agriculture) préparé par
un sous-comité du Alberta Soils Advisory Committee (Comité consultatif sur les
sols de 1 'Alberta), et imprimé par Agriculture Canada, présente un certain
nombre de critères d'évaluation de la qualité du sol pour la production
agricole. En général, ces critères correspondaient à des propriétés qui
peuvent être mesurées de façon quantitative dans le sol. L'interprétation des
résultats, nécessairement subjective, doit prendre en considération d'autres
facteurs, notamment les variables climatiques, les facteurs économiques, les
espèces de culture et les pratiques de gestion. Les critères chimiques sont
les suivants : i) la réaction du sol, ii) la teneur en sel, iii) le rapport
d'absorption du sodium, iv) la concentration de potassium, v) le nitrate
soluble et échangeable, vi) les sulfates et les chlorures, vii) les métaux,
viii) les matières organiques, ix) les matériaux carbonés étrangers et x) les
pesticides. Les critères physiques comportent : i) la vulnérabilité à
l'érosion, ii) la perméabilité à l'eau d'irrigation, iii) la densité
apparente, iv) le taux de saturation en humidité (%), v) l'humidité
disponible, vi) la profondeur de la rhizosphère et vii) la pierrosité.
Finalement, ce rapport souligne l'importance des critères microbiologiques,
mais précise qu'il n'existe aucun moyen quantitatif simple d'exprimer les
processus microbiologiques.
Le Groupe de travail sur la qualité du sol du Comité consultatif sur les
sols de 1' Alberta s'est penché sur la question des critères de qualité du sol,
en ce qui a trait à la perturbation et à la remise en valeur des terres. La
classification des sols arables dans les Prairies était fondée sur : i) la
réaction, ii) la salinité, iii) la sodicité, iv) le pourcentage de saturation,
v) la pierrosité, vi) la texture, vii) la consistance à l'état humide, viii)
la teneur en carbone organique et ix) l'équivalent en CaCC^. Pour la
classification des sous-sols, la teneur en gypse a été prise en considération
mais on n'a pas tenu compte du taux de la matière organique.
- 4 -
La publication spéciale n° 44 de 1' American Society of Agronomy (1982)
renferme un certain nombre de très bons articles qui traitent des effets des
pratiques culturales sur : les propriétés hydrauliques des sols (Klute), la
densité apparente des sols et les caractéristiques mécaniques (Cassel), la
température et la conductivité thermique des sols (Wierenga et al.) et
l'aération des sols (Erickson) . Tous ces auteurs soulignent la difficulté de
mesurer ces caractéristiques et le fait que les changements apportés à ces
caractéristiques, possibles en théorie, ont très peu été étudiés.
CRITÈRES DE QUALITÉ DU SOL
Seuls quelques-uns des paramètres-clés qui peuvent servir à mesurer la
qualité du sol ont été décrits brièvement ci-dessus; le choix final des
critères devrait dépendre des objectifs visés plus précisément. Par exemple,
les critères utilisés pour suivre l'évolution à long terme d'un sol ne sont
pas forcément les mêmes que ceux qui servent à évaluer l'état actuel de la
qualité du sol (variations de productivité ou pertes causées par l'érosion).
On peut choisir, dans ce cas, d'inclure la taille des agrégats et la stabilité
pour prédire les pertes causées par l'érosion, paramètres qui ne sont pas
toujours nécessaires pour assurer un suivi des variations de la qualité.
Il faut également se fixer un sol de référence; ainsi, au Canada, où la
charrue n'est utilisée que depuis cent ans à peine, on se sert fréquemment du
sol à l'état vierge ou cultivé comme sol de référence. Cela peut être
approprié dans certains cas, mais pas toujours. Un sol cultivé depuis moins de
10 à 20 ans conviendrait peut-être mieux.
REFERENCES
Alberta Soils Advisory Committee. Soil quality criteria for Agriculture.
Agriculture Canada. 6 pp.
Anderson, D.W. and E.G. Gregorich. 1983. Effect of soil érosion on soil
quality and productivity. Pp. 105-113 In Soil Erosion and Land
Dégradation. Sask. Inst. of Pedology, Saskatoon.
Cassel, D.K. 1982. Tillage effects on soil bulk density and mechanical
impédance. ASA Sp. Publ. 44: 45-67.
Klute, A. 1982. Tillage effects on the hydraulic properties of soil: a
review. ASA Spécial Publ. 44: 20-43.
Meyer, L.P., A. Bauer and R.D. Heil. 1985. Expérimental approaches for
quantifying the effect of soil érosion on productivity. Pp. 213-234 in
R.F. Follett, B.A. Stewart, eds. Soil Erosion and Crop Productivity. Amer.
Soc. Agron., Madison, Wisc.
Renard, K.G. and R.F. Follett. 1985. A research strategy for assessing the
effect of érosion in future soil productivity in the United States. Pp.
691-702 in S.A. El Swaify, W.D. Moldenhauer and Andrew Lo, eds. Soil
Erosion and Conservation. Soil Cons. Soc. Amer.
- 5 -
Soil Quality Criteria Working Group. 1987. Soil quality criteria relative to
disturbance and réclamation (revised). Soils Branch, Alberta Agriculture,
Edmonton, Alta.
- 6 -
CRITÈRES DE QUALITÉ DU SOL DANS LE CONTEXTE DE L'EST DU CANADA
D.R. COPTE
INTRODUCTION
La présente étude traite des effets de l'érosion (hydrique et éolienne), de
l'acidification et de la compaction sur la qualité du sol. Le concept de
«qualité du sol» peut se comprendre de deux façons :
A. Une série de critères permettant d'évaluer, en fonction de normes
déterminées, si un sol donné peut servir à une fin précise. Par exemple,
s'il s'agit d'appliquer des critères de qualité du sol en vue de
maximiser la productivité agricole ou sylvicole d'une surface unitaire,
ces critères devront refléter le potentiel de productivité du sol pour
des cultures données. Cela s'apparente en de nombreux points à la
classification des sols en fonction des possibilités d'utilisation à des
fins agricoles ou forestières.
B. Les propriétés d'un sol. Dans ce cas, il serait plus juste de parler des
«qualités du sol».
Les auteurs du présent article privilégient la première de ces deux
définitions.
Dans l'est du Canada, la détérioration de la qualité du sol résultant de
l'érosion hydrique fait l'objet d'études depuis plusieurs décennies. Par
exemple, la perte de productivité des sols due à l'érosion a été étudiée pour
le sud-ouest ontarien (Battison et al., 1984), l'est ontarien (Ripley et al. ,
1966), le Québec (Dubé, 1975) et l'île-du-Prince-Édouard (Stewart et Himelman,
1975). La seule étude actuelle de surveillance continue et directe de
l'érosion du sol et de ses effets sur la productivité se fait dans la région
de culture de la pomme de terre du nord-ouest du Nouveau-Brunswick (T.L. Chow,
communication personnelle). À certains endroits en Ontario, au Québec et à
l'île-du-Prince-Édouard des chercheurs examinent les effets de diverses
pratiques culturales du sol sur l'érosion (eaux de pluie et de fonte des
neiges) à l'aide de simulateurs de précipitations (G.J. Wall, G. Meyhus, A.
Pesant et J.R. Burney, communication personnelle). Le principal objet de ces
expériences est d'améliorer la capacité de prévision de l'érosion hydrique et
d'évaluer l'effet de diverses options de pratiques culturales du sol sur les
taux d'érosion.
L'érosion éolienne a moins fait l'objet d'études dans l'est du Canada, bien
que depuis quelques années des épisodes d'érosion éolienne intenses se soient
manifestées dans le sud-ouest de l'Ontario (Fitzsimons et Nickling, 1982) et à
certains endroits dans la partie inférieure de la vallée du Saint-Laurent, au
Québec (F. Fournier, communication personnelle). Ces épisodes se produisent
aussi à l'occasion à l'î.-P.-É., dans la vallée d'Annapolis en Nouvelle-Ecosse
et à Terre-Neuve. Les pertes de productivité n'ont pas été bien étudiées,
mais l'on pense que l'abrasion causée par les particules de sable poussées par
le vent a entraîné une baisse du rendement.
- 7 -
L'acidification du sol est bien comprise bien que peu étudiée, parce qu'il est
souvent difficile de distinguer les sols à pH naturellement faible des sols
qui ont été acidifiés artificiellement (pluies acides ou fertilisants). Des
essais réalisés en laboratoire à l'île-du-Prince-Édouard ont montré, par
exemple, que le pH des échantillons étudiés avait diminué de façon progressive
au fil des ans (Veinot, 1978). D'après des rapports portant sur la perte de
rendement dans les sols sableux du sud de l'Ontario le pH (inférieur à 4,0)
serait responsable en partie de cette diminution (Protz et al. , 1977). Dans
ce cas, les sols seraient normalement considérés comme étant calcaires, comme
ils le sont sous la couche arable. Une large part des sols du Bouclier
canadien, de l'est du Québec et de la région atlantique sont des podzols et
affichent donc un pH naturellement faible. Dans ces régions, l'ajout
d'amendements calcaires est pratique courante; en fait, la correction de
l'acidité est relativement facile et peu coûteuse. L'apparition de zones
d'acidification, comme dans le sud de l'Ontario, pourrait placer les
agriculteurs devant de nouvelles séries de contraintes et de besoins.
La compaction du sol est le phénomène le moins étudié et le moins bien
compris; il s'agit cependant du problème qui pourrait entraîner la plus grande
perte de rendement. La compaction du sol produit un horizon Ap très mal
structuré ou une dense couche à faible perméabilité, située immédiatement sous
la couche Ap (semelle de labour). Dans le premier cas, le type de culture
peut être en partie responsable de ce type de «compaction»; par exemple,
la monoculture de maïs est souvent associée à ce problème. Dans le deuxième
cas, la compaction pourrait résulter plutôt du travail du sol, notamment
lorsqu'il est trempé, et d'une charge élevée des roues.
Il existe peu de données chiffrées permettant de déterminer l'étendue et même
la présence de la compaction du sol dans les champs. Par exemple, dans un
champ de l'est ontarien où l'agriculteur prétendait avoir un problème de
«compaction», l'examen de la structure du sol et la mesure du Ksat ont
révélé que les conditions étaient plutôt favorables à la libre croissance des
racines (J.A. McKeague, C. Wang, communication personnelle). Au moment de
l'examen, le champ était cultivé en orge depuis un an; il était cultivé
uniquement en maïs avant cela. Il n'est pas clair si la culture de l'orge
avait permis de corriger le problème ou s'il y avait réellement un problème.
Des agriculteurs du sud-ouest ontarien ont signalé que les drains souterrains
espacés de 50 pieds ne fonctionnaient plus adéquatement; on a donc installé de
nouveaux drains entre les anciens. Ces mesures résultent peut-être aussi en
partie de pressions exercées par des entreprises spécialisées en drainage.
Dans les basses-terres du Saint-Laurent au Québec, la compaction du sol
s'observe souvent sous certains types de culture, comme le maïs et la
betterave (G. Meyhus, communication personnelle). Certains agriculteurs
utilisent des charrues sous-soleuses, ce qui leur coûte cher, pour tenter
d'améliorer la migration de l'eau dans les sols les plus touchés.
Dans la région de la culture de la pomme de terre du Nouveau-Brunswick, la
compaction du sol semble être partiellement liée à l'érosion. La perte des
couches superficielles, qui se trouvent au-dessus des couches souterraines
naturellement compactes, produit un horizon Ap plus dense et pourrait
expliquer certains des problèmes de «compaction» qui ont été signalés. On
- 8 -
peut s'attendre à ce que les lourdes machines de récolte, sources de
vibrations, entraînent un certain degré de compaction dans le cas de sols
détrempés.
Des études réalisées sur des parcelles expérimentales dans des sols argileux
du sud-ouest québécois ont montré le rôle de la pression des pneus, du
patinage des roues et de l'eau dans le sol dans l'augmentation de la densité
apparente du sol au cours des travaux des champs (Raghavan et al., 1977a, b).
Reid et Goss (1982) ont montré que les racines de maïs augmentent les
problèmes de structure du sol; cela semble avoir été confirmé par des études
réalisées en laboratoire sur un sol du sud de l'Ontario (B. Kay, communication
personnelle). On a également observé que les racines de certaines plantes,
notamment le brome, renforcissaient la structure du sol. Ces effets semblent
cependant varier beaucoup en fonction des saisons, comme cela a été démontré
au Québec, dans des parcelles expérimentales et en laboratoire, à partir d'un
indice des agrégats stables à l'eau (D. Angers, communication personnelle).
Une étude récente vise à définir la compaction d'un sol d'une façon qui
pourrait être mesurée quantitativement au champ (Kay et al., 1986). Wang et
al. (1985b) ont montré que des interprétations morphologiques de la
distribution des racines et des biopores et de la structure du sol ont permis
de prédire de façon relativement fiable les catégories de conductivité
hydraulique du sol (Wang et. al., 1985b).
Il s'agit donc de déterminer, de définir et de quantifier les propriétés du
sol qui sont touchées par l'érosion, la compaction et l'acidification; il faut
aussi préciser les limites pour chaque propriété (seule ou en combinaison avec
d'autres) permettant de caractériser la productivité du sol. Ces limites
doivent cependant être suffisamment sensibles pour que toute variation de la
productivité du sol résultant de la dégradation puisse être détectée. Nous
disposerons alors d'un «réseau d'alerte rapide» en ce qui a trait à la
perte de productivité du sol.
CRITÈRES
Aux fins du présent exposé, les critères de qualité du sol seront classés en
deux catégories : i) ceux qui déterminent l'ampleur et l'importance d'un
problème qui s'est déjà produit (effet cumulatif) et ii) ceux qui permettent
d'identifier un problème potentiel (risque).
Érosion du sol
i. Effets cumulatifs de l'érosion : Il n'existe pas de critères bien établis
permettant de déterminer la perte de qualité ou de productivité du sol
résultant de l'érosion. L'épaisseur de la couche arable sert fréquemment
d'indicateur, mais il s'agit d'un critère peu intéressant. En effet, le
terme «épaisseur» de la couche arable perdue n'a presque aucun sens
puisque le mélange qui se produit à mesure que l'horizon A s'amincit
entraîne des variations continuelles. Les critères de variation de la
profondeur d'enracinement ou de la capacité de rétention d'eau, ou les
deux, sont à peine meilleurs. En effet, il existe rarement une limite
distincte sous laquelle les racines ne pénétreront pas ou à travers
- 9 -
laquelle l'eau ne se déplacera pas dans un plan vertical; il n'existe donc
aucun rapport direct entre ces critères et l'érosion d'un sol. Il est
également possible qu'un sous-sol ait une capacité de rétention d'eau
supérieure à celle du sol superficiel. La perte de productivité du sol a été
calculée en fonction de la perte de rendement par profondeur unitaire de sol
érodé (Lyles, 1975). Cela ne tient pas compte des problèmes de non-linéarité
et de mélange, ainsi que de la variabilité des techniques de gestion du sol;
cette façon de faire n'a, de plus, aucun fondement scientifique. Dans le cas
où des couches peuvent être facilement distinguées (par exemple, des teneurs
en Fe maximales - Oison et Beavers, 1987), la variation d'épaisseur peut
donner une indication de la perte de sol, mais pas nécessairement de la perte
de productivité. Une variation de l'abondance relative de 137Cs dans le sol
est une autre mesure de perte de sol, mais ne vaut que pour l'érosion qui
s'est produite au cours des vingt dernières années (deJong et al., 1983).
Parce que les chercheurs connaissent assez peu les niveaux d'érosion qui se
sont manifestés il y a plus de deux décennies, ce critère pourrait être le
meilleur que nous possédons à l'heure actuelle. Il permet également d'évaluer
les dépôts de sol sur les champs érodés. Ces dépôts pourraient bien expliquer
une certaine part de la variabilité observée dans les mesures d'épaisseur du
sol.
Les variations des propriétés physiques du sol résultant de l'érosion ont été
peu étudiées. Dans certains cas, il semble y avoir une augmentation de la
teneur en sable, accompagnée d'une perte d'argile et de matière organique vu
le potentiel élevé de transport et d'érosivité de ces matériaux (Spires et
Miller, 1978). D'autre part, le sable représentant souvent la fraction
dominante des dépôts dans le champ, vers le bas de la pente (Bourget et
Mclean, 1963), des augmentations de la teneur en sable peuvent donc être
causées par érosion ou par accumulation. Il peut être difficile de distinguer
ces deux causes l'une de l'autre. Les variations de texture (et de structure)
peuvent également résulter du mélange des couches superficielles et des
couches sous-jacentes dont la texture est différente; cela serait difficile à
distinguer des effets de l'érosion différentielle à la surface.
ii. Risque d'érosion : La méthode la plus fréquemment utilisée d'estimation
du risque de l'érosion du sol par la pluie est la Universal Soil Loss
Equation (équation universelle de perte du sol : USLE). Les facteurs de
l'USLE ont été établis aux États-Unis après de nombreuses années de
recherches. Pour utiliser cette équation il faut connaître au moins la
texture du sol et sa teneur en matière organique, l'angle et la longueur
de la pente ainsi que l'énergie de la pluie (Wischmeier et Smith, 1978).
Au Canada, le facteur climatique est de toute évidence beaucoup plus
complexe. En fait, l'effet du gel et du dégel sur l'érosivité du sol
n'est pas encore entièrement connu, bien que l'on estime que la surface
d'un sol tout juste dégelé et qui repose sur un sol gelé est probablement
10 à 15 fois plus érodable que ne l'indique l'estimation «annuelle
moyenne» obtenue par la méthode de l'USLE (Coote et al., 1988a; Wall et
al. . 1988). Par contre, à la fin de l'été, lorsque la surface du sol est
sèche et dure ou, lorsqu'elle est gelée en hiver, l'érosivité pourrait
être inférieure à ce que laisse croire l'estimation obtenue par l'USLE
- 10 -
(Kirby et Meyhus, 1987). Il est nécessaire de déterminer l'érosivité
saisonnière afin d'estimer les risques d'érosion hydrique pour diverses
cultures et différents scénarios de gestion du sol au Canada.
L'application des facteurs climatiques à l'érosion hydrique au Canada
doit tenir compte du ruissellement de l'eau de fonte des neiges et de la
fréquence des cycles de gel et de dégel. Le facteur de l'eau de fonte a
été traité très brièvement dans l'étude de l'USLE, dans la partie sur les
précipitations hivernales totales (Wischmeier et Smith, 1978), mais le
facteur des cycles de gel-dégel n'a pas du tout été inclus.
La US Wind Erosion Equation (équation américaine d'érosion éolienne) est
le seul outil qui permet à l'heure actuelle d'estimer le risque d'érosion
éolienne dans l'est du Canada (Woodruff et Siddoway, 1965). Pour
utiliser une autre méthode, appliquée avec succès dans la région des
Prairies (Coote et al., 1988b), il faut des données sur l'humidité du sol
qui ne sont pas encore disponibles pour l'est du Canada. Comme pour
l'érosion hydrique, l'érosion éolienne semble être maximale tout de suite
après la fonte printanière là où s'observent des agrégats granulaires
fins à la surface des sols secs (Hilliard et al., 1988). Les tableaux
américains de l'érosivité des sols en fonction de la texture semblent
sous-estimer l'érosion éolienne des sols canadiens au début du printemps,
lorsque le problème est généralement le plus marqué.
Acidification du sol
i. Acidité cumulative : L'évaluation du degré d'acidification du sol à un
endroit donné se limite essentiellement, pour des raisons pratiques, à
celui qui résulte de l'application de fertilisants. Une telle évaluation
n'est fiable que s'il est possible de comparer le sol à un autre sol
semblable, de la même zone, qui n'a jamais été amendé (ni chaulage, ni
fertilisant). L'examen de la variation de pH dans des champs d'une même
région, où le type de sol est le même, mais où les pratiques de
fertilisation et de chaulage ont été différentes, peut fournir une
estimation préliminaire de l'acidification passée. Les critères sont le
pH du sol, la capacité d'échange cationique et la saturation en bases.
Un ou plusieurs de ces paramètres sont déterminés depuis des décennies
sur des échantillons de sols cultivés par des laboratoires provinciaux
d'essai sur les sols. Les recommandations portent généralement sur la
quantité de chaux nécessaire pour que le pH du sol atteigne le niveau qui
convient aux plantes cultivées. Dans les cas où les résultats d'essais
sur les sols sont disponibles pour un même champ sur une période de
plusieurs années, on peut estimer le taux d'acidification. Il faut être
très prudent dans l'évaluation des valeurs du pH obtenues de cette façon
si le champ a été échantillonné à des périodes différentes de l'année ou
si les techniques utilisées en laboratoire ont changé.
ii. Risque d'acidification : Le risque d'acidification du sol peut être
estimé à partir de données portant sur les bases échangeables et la
«capacité tampon». Le cas échéant, les bases échangeables peuvent
être estimées à partir du pH et de la capacité d'échange cationique (CEC)
- 11 -
et la CEC peut être estimée à partir de la texture et de la teneur en
matières organiques (Wang et Coote, 1980).
L'acidification résultant de la fertilisation peut être estimée à partir
de la quantité connue de fertilisants utilisés. Tisdale et Nelson (1985)
ont publié des tableaux de l'acidité produite par l'ajout de divers
fertilisants. L'apport en pluies acides est aussi généralement connu;
Barrie et al. (1980) ont publié une carte des configurations des
précipitations pour tout l'est du Canada. Les lignes relient des valeurs
ponctuelles déterminées à partir de données sur les retombées
atmosphériques prélevées à des sites d'échantillonnage. L'auteur a
élaboré un modèle permettant d'estimer le taux d'acidification du sol en
fonction des cycles des bases et des acides dans le sol et les cultures;
les données d'entrée peuvent être les quantités de fertilisants et de
pluies acides pour un type de sol et une pratique culturale donnés.
Compaction du sol
i. Compaction cumulative : La compaction du sol qui s'est déjà produite a
été estimée à partir d'un certain nombre de propriétés physiques du sol,
notamment la densité apparente, le Ksat, la résistance au pénétromètre,
les taux de diffusion d'oxygène, la porosité, la structure, la
micromorphologie et les modes de distribution des racines (Coote et
Ramsey, 1983; Taylor et al., 1981; Wang et al., 1985a). Pour chacune de
ces propriétés il semble y avoir une série de problèmes associés à la
variabilité entre les sites, à la texture et à la teneur en humidité.
La densité apparente semble l'une des mesures les plus évidentes pour
évaluer la compaction d'un sol puisqu'il s'agit d'une mesure directe
d'une propriété du sol qui représente en principe un indicateur clair du
degré de resserrement des particules de sol, c'est-à-dire de la
«compaction du sol». Cela n'est cependant pas si simple. D'abord,
la densité apparente est fonction de la densité des particules de sol
pour tout «degré de compaction». La densité particulaire est moins
grande pour l'argile que pour le sable et l'est encore moins pour la
matière organique. De plus, la densité varie en fonction de la
minéralogie chez les argiles. Ensuite, les sols riches en argile ou en
matière organique rétrécissent ou gonflent selon les modifications de la
teneur en humidité, faisant ainsi varier la densité apparente alors que
la compaction ne change pas.
Troisièmement, il est difficile et long de mesurer avec précision la
densité apparente sur le terrain. De même, une certaine part de
compression ou d'éclatement, selon la teneur en humidité, est presque
inévitable dans le cas des méthodes de carottage (Blake, 1965).
L'atténuation des radiations provenant d'une source abaissée dans un trou
dans le sol est moins destructrice et beaucoup plus rapide. Le
perfectionnement récent des instruments à deux sondes exploratrices
parallèles a simplifié la mesure des variations de la densité apparente
en fonction de la profondeur (Gameda et al., 1983). Il n'est cependant
possible que de mesurer la densité humide de cette façon; des mesures
- 12 -
précises de l'humidité du sol sont nécessaires afin de pouvoir déterminer
la densité apparente réelle.
Des travaux de recherche réalisés dans la région d'Ottawa semblent
indiquer que le Ksat in situ est l'un des meilleurs indicateurs de la
«compaction» (Coote et Ramsey, 1983). Ce paramètre a été déterminé à
l'aide d'un perméamètre à entrée d'air, ce qui est une technique lente.
La variabilité du Ksat est très élevée lorsqu'il est mesuré sur le
terrain; l'utilisation du perméamètre de Guelph pourrait permettre
d'augmenter le nombre de mesures, et donc fournir de meilleures
estimations du Ksat moyen de chacune des zones de profondeur du sol là où
cette méthode fonctionne bien. La méthode morphologique simple d'examen
de la structure du sol (y compris les pores) a permis de calculer avec
succès le Ksat vertical (McKeague et al., 1986) et horizontal (Wang et
al., 1985b).
La méthode de la résistance au pénétromètre (RP) est également attirante
par principe parce qu'elle évoque l'image des racines qui tentent de
pénétrer le sous-sol. Malheureusement, la RP est étroitement liée à
l'humidité du sol et doit donc être utilisée avec des courbes
d'étalonnage humidité/RP ou limitée à des comparaisons à l'intérieur d'un
seul site où l'humidité du sol ne risque de varier que très légèrement.
Les instruments à enregistreurs de données automatiques fournissent des
résultats très rapidement, dont l'interprétation demeure difficile; il
est aussi compliqué d'établir des limites.
Les taux de diffusion de l'oxygène (TDO) sont une autre façon de mesurer
indirectement la compaction du sol (Lemon et Erickson, 1952). Le
déplacement d'oxygène vers une électrode qui peut être insérée à une
profondeur choisie dans le sol simule l'apport en oxygène aux racines des
plantes, indiquant ainsi la qualité relative de l'environnement gazeux de
la racine; des valeurs faibles représentent des conditions de compaction
dans les sols à texture fine. Cette méthode a tendance à produire des
résultats dont la variabilité est très élevée parfois pour un même site
(Coote et Ramsey, 1983). En effet, c'est dans le sol qui entoure
immédiatement la très petite électrode (4 mm) qu'est déterminé le TDO;
selon que l'électrode est dans un agrégat ou dans un macropore entre deux
agrégats, la valeur obtenue sera très différente.
La porosité est un terme que l'on peut comprendre de diverses façons. La
porosité peut servir à décrire l'espace total occupé par les pores, peu
importe la teneur en humidité, depuis l'échantillon saturé jusqu'à
l'échantillon séché à l'étuve, ou l'espace empli d'air pour une teneur en
humidité ou tension de l'eau précisées (Vomocil, 1965). La porosité est
une mesure directe de la compaction du sol, étroitement liée à la densité
apparente. La mesure de la porosité comporte des difficultés semblables
à celles de la mesure de la densité apparente.
L'examen de la structure, ou macromorphologie, est l'une des meilleures
méthodes d'identification d'un sol à grande compaction (McKeague et al. .
1987). En effet, la description de la taille, de la forme et de la
- 13 -
résistance des agrégats fournit beaucoup de renseignements sur l'état du
sol. Cependant, ces descriptions peuvent être subjectives et
l'examinateur devrait suivre avec attention la méthode quantitative
(McKeague et al., 1986) pour décrire la morphologie du sol.
L'examen de la micromorphologie du sol fournit des renseignements plus
détaillés sur le tassement, l'orientation et la cimentation des
particules. La micromorphologie est difficile à quantifier mais peut
quand même être utile, ajoutée aux autres observations, aux données sur
la densité apparente, etc.
Les configurations de la distribution et de la densité des racines
peuvent être des indicateurs directs des problèmes de compaction du sol;
leur quantification est cependant destructrice et très longue à réaliser
(Stone et al., 1987). Les configurations de la distribution des racines
peuvent correspondre à des horizons compactés et à des discontinuités
dans ces horizons. L'étude de ces configurations, ainsi que d'autres
données, pourraient fournir l'information la plus claire en ce qui a
trait à la nature et à l'ampleur du problème de compaction du sol.
ii. Risque de compaction : À l'heure actuelle, le risque de compaction du sol
n'a été calculé qu'à partir d'un rapport général entre la texture, le
drainage et le passage des équipements mécaniques (Fox et Coote, 1986).
Comme ce rapport a été calculé à partir d'observations non quantifiées,
il s'agit d'un indice sans unité. La compactibilité, déterminée à partir
des essais de densité Proctor normaux réalisés en laboratoire, est un
indice qui convient à l'interprétation technique; la compactibilité a
servi à déterminer la vulnérabilité d'un sol à la compaction dans des
droits de passage de lignes de transmission (McBride, 1983). La
classification de la vulnérabilité des sols à la compaction obtenue de
cette façon ne semble pas refléter les problèmes de «compaction»
signalés par les agriculteurs. Aucune autre méthode d'évaluation des
risques n'a encore été publiée, bien que des chercheurs à Guelph
travaillent à l'élaboration d'une méthode à l'heure actuelle (R. McBride,
communication personnelle).
ANALYSE ET CONCLUSION
Les critères potentiels d'évaluation de la qualité du sol minéral sont
nombreux. Les données scientifiques nécessaires pour le choix objectif de
critères et la vérification de modèles sont généralement rares. Les
chercheurs préfèrent souvent utiliser les propriétés chimiques et physiques
qu'ils savent d'expérience interpréter. Il n'est peut-être pas encore
possible de faire l'unanimité sur le choix des critères permettant de
surveiller et d'évaluer la qualité du sol.
Comme il est inévitable que tout projet d'évaluation de la qualité du sol soit
limité par des contraintes économiques, il faut recueillir, à moindre prix, la
plus grosse quantité possible d'information, plutôt que de «données». Il
est donc important de réaliser d'abord les examens qui fournissent, à faible
coût, beaucoup de renseignements sur la qualité du sol.
- 14 -
i) Dans un site, sans l'aide <T instruments particuliers ou sans analyse, il
est facile d'estimer ou de mesurer la profondeur du matériau parental ou
de la couche limitant la pénétration des racines, la texture, la couleur,
la structure, la distribution des biopores et des racines, la pente et la
classe de drainage. Les classifications, déterminées à partir de
l'interprétation de ces observations, par exemple la classification de la
conductivité hydraulique (McKeague et al., 1986) permettent de maximiser
encore plus ces renseignements obtenus de façon relativement facile.
Toute trace d'érosion éolienne ou hydraulique devrait également être
notée et décrite. De même, le modelé du relief, l'utilisation du sol et
le système d'exploitation doivent être notés pour chaque site.
ii) L'étude de la qualité du sol d'un site devrait probablement comporter
l'examen des tests les plus simples, réalisés en laboratoire, qui
fournissent des renseignements sur la productivité du sol. La teneur en
matière organique, le rapport C/N, le pH, la CEC et les bases
échangeables de la couche superficielle, étudiés ensemble avec les
observations déjà amassées sur le terrain, permettent d'avoir une idée de
la fertilité du sol et de la sensibilité du sol à l'acidification. La
teneur en matière organique donne une indication de l'érosivité du sol et
de sa vulnérabilité à la compaction, surtout là où des différences
s'observent entre des sites au sol semblable ou dans les cas où des
variations s'observent avec le temps. Mis à part le pH, plutôt soumis à
des variations saisonnières, ces mesures réalisées en laboratoire sont
relativement sensibles aux modifications apportées par l'érosion ou les
cultures intensives.
iii) Ensuite, l'évaluation de la qualité du sol nécessitera une analyse
granulométrique complète, par intervalles de profondeur déterminés en
fonction des caractéristiques du profil, afin de quantifier les
estimations faites sur le terrain par détermination à la main de la
texture. Cela pourrait être suivi par une série de courbes de désorption
de l'humidité du sol (pour des intervalles de profondeur semblables) à
partir desquelles il sera possible de déterminer la capacité de rétention
d'eau, la distribution de la taille des pores et des pores remplis d'air,
pour un potentiel de l'eau du sol donné. Cette information permet
généralement de caractériser le degré et la nature de toute compaction
qui peut se produire. Il faut également déterminer le P et le K
extractibles qui permettent de mieux évaluer la fertilité du sol.
iv) Finalement, l'étude peut se poursuivre selon les intérêts de
l'examinateur, en fonction du temps et du budget dont celui-ci dispose.
Nombre des essais dont il a été question précédemment peuvent être
réalisés si on en comprend bien le but et si on sait comment les
interpréter.
Les trois premières étapes, mentionnées ci-dessus, d'une étude de qualité du
sol représentent le minimum de ce qui devrait être entrepris pour la
surveillance continue des sols minéraux dans l'est du Canada, respectivement
pour chacun des trois champs d'intérêt suivants :
- 15 -
i) Une cartographie généralisée des problèmes de compaction et d'érosion du
sol existants et potentiels pour toute une gamme d'échelles.
ii) L'établissement d'un réseau de sites de référence qui pourraient être
examinés à des intervalles de 5 à 10 ans afin d'évaluer toute
modification qui pourrait avoir un effet notable sur la productivité du
sol à l'échelle régionale et qui permettrait de comparer la qualité du
sol pour l'agriculture avec les unités cartographiées ou les sites
cartographiés à l'échelle du 1:50 000 ou moins.
iii) L'établissement de sites détaillés de surveillance de la qualité du sol
dans des sols d'importance régionale ou locale, ou dans des sols pour
lesquels la surveillance de la dégradation est très importante pour des
raisons économiques ou environnementales.
Les études de qualité du sol les plus détaillées (iv) devraient probablement
être réservées aux sites où des projets de recherche sont en cours et où le
chercheur est le principal responsable de l'interprétation et de la
présentation des données.
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- 19 -
CRITÈRES DE QUALITÉ DES SOLS ORGANIQUES
M. LÉVESQUE et S. P. MATHUR
INTRODUCTION
Il n'y a pas si longtemps, on considérait les tourbières canadiennes comme
étant des terrains incultes qui entravaient le transport et le développement
des sols minéraux avoisinants. Aujourd'hui, les sols organiques de plusieurs
régions ont une grande valeur puisqu'ils produisent des cultures évaluées à 75
millions de dollars (1988). De toute évidence, les tourbières doivent
l'intérêt qu'elles suscitent au développement de nouvelles techniques de
gestion du sol et à l'établissement d'une industrie horticole viable.
Les tourbières s'observent fréquemment dans les zones tempérées et
subarctiques qui ont déjà été recouvertes de glaciers; en milieu plus chaud,
elles s'observent généralement en altitude et dans les plaines d'inondation
fluviales, les deltas et les estuaires. Environ 12 % de la surface terrestre
du Canada est recouverte d'au moins 40 cm de matériaux organiques moyennement
décomposés ou de 60 cm de matériaux organiques légèrement décomposés. Au
Canada, les sols organiques représentent les sols dominants sur 927 113 km2
et s'observent en association avec d'autres sols sur une superficie
additionnelle de 152 751 km2. Environ 60 % de ces sols sont gelés en
permanence (Clayton et al. f 1977; Tarnocai, 1980). Comme les zones de
tourbières exploitées sont situées dans les régions les plus tempérées du
pays, les tourbières cultivées ont une étendue limitée, dont la proportion est
faible par rapport à la superficie totale des tourbières. Par exemple, sur
plus de 20 millions d'hectares de tourbières que possède le Manitoba, très peu
sont cultivés. Par contre, c'est dans le sud de l'Ontario, où les tourbières
sont rares par rapport à ce qu'elles sont dans le nord, que se trouve la
deuxième plus importante concentration de sols organiques cultivés au Canada
(6 500 ha). La situation est semblable au Québec où les 7 100 ha cultivés
sont presque tous concentrés dans la région du sud-ouest. En termes relatifs,
les tourbières sont beaucoup plus utilisées en Colombie-Britannique où la
superficie cultivée est de 1 250 ha. La Colombie-Britannique est un peu
particulière à cet égard en ce que, en plus des dépôts organiques du cours
inférieur du Fraser qui sont essentiellement utilisés pour les légumes, les
tourbières minérotrophes herbeuses du plateau intérieur servent aux cultures
fourragères et aux pâturages.
Les cinq principales régions d'exploitation des sols organiques au Canada
sont le sud-ouest québécois, le sud de l'Ontario, le sud-est manitobain, la
partie inférieure de la vallée du Fraser et le plateau intérieur de la
Colombie-Britannique. Cette distribution résulte de l'influence de certains
facteurs : le climat, la proximité du marché et la qualité et la nature des
dépôts organiques. Les tourbières cultivées occupent généralement des zones
contigues aux meilleurs sols minéraux dans ces régions. Les sols organiques
doivent donc présenter un potentiel agricole élevé et spécifique pour attirer
l'attention des producteurs de légumes qui investissent les ressources
nécessaires pour les mettre en valeur et les exploiter. Nous voulons donc
souligner ici les raisons pour lesquelles les sols organiques conviennent à
l'agriculture, malgré les problèmes de drainage et de gestion.
- 20 -
Les sols organiques représentent un bon milieu de croissance pour les
plantes; à preuve, ils constituent une épaisse masse de matériaux organiques
partiellement décomposés qui offre les avantages suivants : une capacité
élevée d ' emmagasinement de l'eau et des éléments nutritifs, une faible densité
apparente, une résistance élevée aux variations physiques, chimiques et
environnementales extrêmes, un important bassin de N. Par leur nature, les
sols organiques peuvent retenir l'eau et en fournir de façon plus importante
que ne le peuvent les sols minéraux. En effet, puisqu'ils sont organiques,
ils opposent peu de résistance à la croissance des racines. Dans des
conditions normales, les sols organiques conviennent particulièrement aux
cultures qui ont besoin d'un apport continu en eau et en azote, dont les
racines ont besoin d'espace pour croître et où des particules de terre ne
tachent pas les produits. Signalons que les sols organiques ne possèdent pas
toujours les caractéristiques énumérées ci-dessus. En outre, les sols
organiques, contrairement aux sols minéraux, constituent des ressources non
renouvelables; en effet, le drainage, le chaulage, la fertilisation et le
travail du sol hâtent l'oxydation biochimique qui entraîne un affaissement des
sols et leur disparition éventuelle (Mathur, 1987). Au fil des ans, la
productivité viable et la facilité de gestion des sols organiques diminuent à
mesure que, sous l'effet des cultures, des couches successives de sol sont
exposées puis s'épuisent. Pour bien utiliser et bien gérer les sols
organiques, il est donc primordial d'en bien connaître la nature, les
propriétés et les comportements. Il est particulièrement important de
déterminer des critères pertinents de qualité du sol afin de mesurer toute
variation liée aux cultures et d'en évaluer l'impact sur la valeur agricole de
ces sols. L'utilisation de critères adéquats permettrait également de mettre
au point des moyens de préserver la productivité des sols tout en minimisant
les pertes de matières organiques et les problèmes de pollution.
SOLS ORGANIQUES - LEURS PROPRIÉTÉS
Conformément au système canadien de classification des sols (Commission
canadienne de pédologie, 1978), un sol est dit organique lorsque les couches
organiques superficielles renferment plus de 17 % de C et que leur épaisseur
dépasse 40 cm. Cette définition ne permet pas de déterminer ce qui constitue
la qualité d'un sol organique et ses caractéristiques souhaitables. Un sol
organique idéal pour l'agriculture devrait être constitué d'un ensemble de
propriétés naturelles, acquises harmonieusement et se combinant de façon à
assurer un niveau élevé de productivité et de qualité des cultures sans qu'il
ne soit nécessaire d'apporter des correctifs coûteux ou difficiles.
Les sols organiques se composent de débris végétaux partiellement
dégradés renfermant une faible teneur en matières minérales. À l'état vierge,
ils renferment jusqu'à 90 % d'eau en poids. Les propriétés naturelles
souhaitables des sols organiques récemment mis en valeur seraient donc les
suivantes :
- teneur élevée en matières organiques (>90 %)
- porosité élevée
- teneur en éléments nutritifs faible
- acidité élevée (pH : 3-5)
- capacité d'échange élevée (>100 meq/100 g)
- 21 -
- faible densité apparente (0,05-0,20)
- capacité de rétention d'eau élevée (300 à 1500 % du poids sec)
- faible capacité portante
- biodégradabilité (sensibilité à l'affaissement).
Il existe des différences caractéristiques entre ces propriétés et celles des
sols minéraux; nombreux sont ceux qui admettent que la valeur agricole des
sols organiques est surtout due à leurs propriétés physiques (Njos, 1978).
Après avoir passé en revue la documentation portant sur les sols
organiques (nature, propriétés et utilisations) (Farnham et Finney, 1965;
Jasmin et al. . 1981; Lévesque, 1982; Lévesque et al. . 1977; Lévesque et
Mathur, 1979; Lévesque et al. . 1980; Lucas, 1982; Mathur et Farnham, 1985;
Njos, 1978; Robinson et Lamb, 1975; Schothorst, 1982; Valmari, 1982), les
auteurs ont déterminé les caractéristiques souhaitables d'un sol organique,
dans les cas où la fertilisation est adéquate :
1. composition floristique particulière (cypéracées, mousse de sphaigne
et bois en proportions respectives de 60, 40 et 10)
2. niveau moyen de décomposition (25-35 % de fibres frottées ou H4-H5)
3. couche superficielle organique supérieure à 80 cm
4. légère acidité (pH : 5-6)
5. capacité d'échange cationique supérieure à 100 meq/100 g
6. proportion importante de matériaux grossiers (bois)
7. couche de 50-80 cm non saturée d'eau, c'est-à-dire présence d'une
couche superficielle d'aération pour permettre la croissance
8. densité et porosité uniformes dans la zone d'aération
9. situation de préférence sur un sous-sol sableux
10. résistance à la biodégradation (vitesse de décomposition lente),
grâce, en partie, à la présence de quantités suffisantes de Cu dans
le sol
11. teneur en matières minérales de 10 à 20 %
12. capacité portante suffisante (supérieure à 5 kg.cm-^)
13. conductivité hydraulique adéquate (Ksat. >1.0 m.d~l).
Certaines de ces propriétés ont été à peine évaluées, en tout cas pas
suffisamment, dans une optique de qualité et de productivité des sols
organiques. Il en sera question dans les sections suivantes.
Nous connaissons maintenant les propriétés intéressantes des sols
organiques; voyons quels sont les principaux désavantages de ces sols :
1. acidité
2. biodégradabilité (sensibilité à l'affaissement)
3. nécessité d'utiliser des pratiques de gestion et de mise en valeur
spéciales
4. faible capacité portante
5. lenteur à se réchauffer (le sol est donc généralement plus frais que
les sols minéraux avoisinants durant la période de germination des
graines)
- 22 -
6. prédominance générale d' emmagasinement de l'eau sur la transmission
de l'eau
7. densification et compaction au fil des ans
8. choix relativement limité de cultures.
Nous traiterons de ces caractéristiques dans le contexte de l'utilisation
à long terme des sols organiques dans les sections suivantes.
CHANGEMENTS GÉNÉRAUX ASSOCIÉS À LA MISE EN VALEUR ET À LA CULTURE DES SOLS
ORGANIQUES
Dès qu'une tourbière est drainée, le processus naturel de formation de la
tourbe s'arrête et les forces de dégradation déjà en cours s'intensifient.
Après avoir été drainée puis chaulée, fertilisée et travaillée, la tourbe,
matériau parental des sols organiques, évolue. On peut dire de certains des
changements qu'ils sont avantageux, notamment la diminution de l'acidité, la
libération de l'azote au moment de la décomposition et la désagrégation
physique des fragments végétaux grossiers. Par contre, les changements
apportés par la culture du sol sont plutôt néfastes puisqu'ils contribuent à
la détérioration des sols organiques (humification et minéralisation du
matériau parental organique). L 'humification et la minéralisation entraînent
la densification, la compaction, l'abaissement de la porosité totale, la
diminution du taux d'infiltration de l'eau, la translocation des éléments
nutritifs et des particules fines vers le bas et d'autres effets, notamment
l'affaissement. Ces changements méritent qu'on s'y attarde parce qu'ils sont
si importants. C'est ce qui a été fait en passant en revue certains travaux
qui s'y rapportent, réalisés autant au Canada qu'à l'étranger.
PROBLÈMES LIÉS À L'UTILISATION DES SOLS ORGANIQUES
Nous avons examiné des sols organiques du sud de l'Ontario, du sud-ouest
du Québec et du sud de la Colombie-Britannique; voici, d'après nous et d'après
quelques producteurs, une liste des principaux problèmes de dégradation que
connaissent les sols organiques :
1. Création d'une nappe phréatique perchée par suite de l'accumulation
de particules fines ou d'argile à la surface du sol.
2. Faible taux d'infiltration de l'eau durant les périodes de
précipitations intenses, ce qui endommage les cultures et limite les
travaux des champs.
3. Compaction de la couche superficielle liée essentiellement à
l'irrigation nécessaire pour éviter l'érosion du sol après
1 ' ensemencement .
4. Dommages causés aux jeunes plants, notamment les cultures de
légumes-feuilles, dans des sols dont la teneur en matières minérales
est supérieure à 20 %, par les particules de sable ou de silt
balayées par le vent au cours des périodes de sécheresse printanière.
5. Augmentation de la superficie couverte par des îlots de sols minéraux
à mesure que disparaît la couche superficielle organique. Cela peut
mener à une perte de terrain cultivable (apparition d'un substrat
minéral inadéquat). Les pertes pourraient atteindre 1 % par année;
- 23 -
plusieurs producteurs ont signalé des pertes de 20 % des sols
organiques productifs et utilisables depuis les 25 dernières années.
6. Perte de productivité causée par la monoculture prolongée qui se
traduit généralement par une infestation par des insectes nuisibles,
des maladies, et une compaction physique.
7. Travaux supplémentaires nécessaires à cause de l'affaissement : vider
les fossés et replacer les drains.
8. Augmentation nécessaire du volume de fertilisation ajouté. D'après
certains producteurs, cette augmentation serait de l'ordre de 25 à
50 %. Ce sont bien sûr la densification et la minéralisation du sol
au fil des ans qui sont responsables en partie de cette augmentation.
9. Gestion du sol plus difficile à cause de l'hétérogénéité que
présentent les sols altérés.
10. Choix limité de cultures.
11. Contrôle plus étroit de l'irrigation, nécessaire afin d'empêcher un
lessivage trop important des éléments nutritifs ou la formation d'une
couche compacte à la surface.
12. Adoption nécessaire de nouvelles pratiques culturales pour compenser
les inconvénients des sols minces.
13. Pratique de la succession des cultures essentielle afin de prévenir
toute perte de productivité.
14. Complexité de la gestion des mesures de lutte contre les mauvaises
herbes et les insectes nuisibles vue l'inégalité de la croissance des
plantes (présence d'îlots de sol minéral).
15. Présence de sous-sols pierreux et graveleux (l'extraction des pierres
et le creusement de fossés sont coûteux) .
16. Augmentation de la fréquence des bris de machines agricoles à mesure
que se rencontrent les couches de sol minéral, l'équipement
spécialisé utilisé pour les sols organiques étant moins résistant que
l'équipement destiné aux sols minéraux.
Ces problèmes existent tous, mais peu de données scientifiques
permettent de les cerner et de les évaluer adéquatement. Il est donc
nécessaire d'amasser des données de base sur l'utilisation et la gestion des
sols organiques.
CHANGEMENTS PHYSIQUES. CHIMIQUES. BIOCHIMIQUES ET MICR0M0RPH0L0GI0UES
Certains chercheurs (van Heuveln et al. , 1960; Jongerius et Pons, 1962;
van Heuveln et De Bakker, 1972; Domsodi, 1980), dont les Hollandais qui
mettent en valeur, utilisent et gèrent des sols organiques depuis longtemps,
ont décrit les processus de formation des sols organiques selon un schéma
qu'ils appellent : formation progressive des sols. En fonction de la nature
du matériau parental et des conditions environnementales, se forment le mull
(favorable à la culture) et le moder (qui convient moins bien à la culture).
Il est intéressant de remarquer, qu'en Europe, les processus de formation du
sol ont été grandement marqués par l'homme et les techniques spéciales de
gestion de la tourbe qui y sont pratiquées comme l'ajout d'argile, de sable et
de matières minérales. Les processus de formation du sol organique se
déroulent en gros de la même façon que ceux à l'oeuvre dans les sols minéraux.
- 24 -
À partir de techniques micromorphologiques, Hammond et al. , (1982) ont pu
montrer le rapport existant entre les microstructures et les propriétés
physiques et chimiques (densité apparente, pH, capacité de rétention d'eau,
teneur en cendres) des sols qui sont gérés et améliorés depuis plus d'un
siècle. La microstructure des horizons 0 des mulls, généralement associée à
de bons sols organiques productifs, résulte de l'homogénéisation des sols
subséquente au processus de désintégration. Ceci illustre le fait que les
sols organiques d'abord composés de matériaux tourbeux bruts mettent
énormément de temps à atteindre un tel stade de développement.
Les chercheurs s'entendent généralement sur les changements généraux
apportés par la culture aux sols organiques. Ainsi, la mise en culture et le
travail continu du sol entraînent des augmentations de la densité apparente,
de la teneur en cendres, du pH, de N total, des concentrations de P, K, Ca, Mg
et de la plupart des ions métalliques, de la C.E.C., de l'indice
d'humi fi cation, des substances humiques, de la lignine, du bitume et des
activités microbiennes ainsi qu'une diminution du carbone total, de la
cellulose, de 1 'hémi-cellulose, de la capacité maximale de rétention d'eau, de
la porosité totale, du rapport carbonerazote et de la teneur en fibres
frottées (Eigen, 1961; Filippenko, 1954; Frecks et Puffe, 1958; Colyakov,
1959; Jasmin et al. . 1981; Kuntze, 1976; Lévesque et al. . 1982 et 1987; Lucas,
1982; Lupinovick, 1968; Njos, 1978; Peterson et al. . 1945; Townsend et MacKay,
1963). Ces études ne concordent pas sur tous les aspects, mais montrent que
des pratiques de gestion et de culture données ont un effet global sur
plusieurs propriétés, notamment la teneur en N, la porosité et la capacité de
rétention d'eau. De plus, la majorité de ces changements ne se produisent que
dans la couche arable (Staker et Jornlin, 1945; Lévesque et al. t 1982).
D'après Pessi (1961), la perte des caractéristiques propres à la tourbe après
une longue période d'exploitation résulterait de l'augmentation de la teneur
en cendres dans la couche arable. Cette perte qui se produit au cours du
vieillissement du sol ne peut être ignorée, mais on peut dire que les
processus longs et continus d'humi fi cation et de minéralisation ont une
influence capitale sur les transformations des sols organiques (Mathur et
Farnham, 1985). De plus, un apport de matériaux vierges provenant des couches
inférieures et se mélangeant à la couche arable, résultat de l'affaissement,
vient compliquer les choses.
Dans le cadre d'une étude récente portant sur des champs cultivés entre 0
à 15 ans, Lévesque et al. (1982) a montré que les changements chimiques liés à
l'humification et la minéralisation ne se produisaient que dans les couches
arables, contrairement aux changements physiques qui s'observaient plus en
profondeur dans les profils de sol. L'établissement d'un synchronisme
stratigraphique entre les couches souterraines par analyse palynologique s'est
avéré un élément-clé de cette étude (Mathur et al. f 1982). Dinel et al.
(1987) ont montré que la culture des sols de marécages entourés de digues
apportait des changements chimiques dans tout le profil du sol, mais aussi que
ces changements résultaient d'un mouvement descendant de matériaux organiques
fins partiellement dégradés. Ces études montrent bien que les mesures visant
à contrôler l'affaissement à long terme des sols organiques cultivés devraient
porter sur la couche superficielle, puisque c'est là où se produit la majeure
partie de l'oxydation biochimique.
- 25 -
HUMIFICATION ET AFFAISSEMENT DES SOLS ORGANIQUES
Avant d'exploiter une tourbière, il faut dans tous les cas la drainer,
afin d'aérer la tourbe. Dans le cas des tourbes utilisées pour l'agriculture,
l'augmentation de la décomposition et de 1 'humification résultant du drainage
est encore accélérée par le chaulage, la fertilisation et le travail du sol
nécessaires aux cultures. D'après Bramryd (1980) notamment, l'effet de la
décomposition et de l'humification des tourbières drainées sur les cycles
globaux du carbone et de l'azote est considérable. Parce que l'humus produit
est plus compact que les résidus végétaux non décomposés, l'humification
contribue également à la perte de volume du dépôt organique. Cette perte se
traduit par un abaissement lent et régulier de la surface des sols cultivés de
1 mm à 7 crn.a-!. L'examen de ce phénomène d'affaissement permet d'observer
les effets relatifs de divers facteurs sur le taux d 'humification dans les
tourbières (Mathur, 1982).
Les tourbes plus riches en cellulose se décomposent plus, et plus
rapidement, que ne le font les tourbes ligneuses. Il est entendu que le
climat exerce une influence sur tous les processus biologiques; Eggelsman
(1976) a montré que, pour un groupe de tourbières minérotrophes , les taux
d'affaissement étaient corrélés au facteur de Lang (précipitations annuelles
en mm/température moyenne en °C). Il faut s'assurer que la surface de
saturation reste élevée sous une tourbière exploitée puisque l'eau remplace
alors l'air dans les pores du sol, ce qui permet de réduire l'humification et
l'affaissement. Le niveau auquel la surface de saturation peut être maintenue
de façon pratique et sûre est déterminé en partie par la nature des cultures.
Le choix des cultures détermine également la valeur du pH du sol à atteindre
par chaulage. La décomposition microbienne et l'humification qui l'accompagne
sont maximales dans un sol de pH neutre ou presque. D'après Frercks et Puffe
(1959), environ 50 % de l'augmentation du taux de décomposition due à une
augmentation du pH se produit lorsque le pH est situé entre 4 et 6. La
majorité des cultures agricoles exigent un sol de pH supérieur à 5,0-5,5, bien
que pour certaines cultures, les rendements peuvent être acceptables avec des
pH plus faibles (Lévesque et Mathur, 1983; Mathur et Lévesque, 1983). À
mesure que la décomposition et l'humification progressent et que la tourbe
devient plus dense, les vides entre les particules de sol deviennent plus
petits. Comme les micropores ont plus tendance à être anaérobies que les
macropores, l'humification ralentit au fil du temps faute d'oxygène. Là où la
densité des racines est élevée, par exemple sous du gazon, l'oxygène peut
manquer. Ainsi, les sols tourbeux sous cultures de graminées ont tendance à
moins se décomposer et s'affaisser que les sols sous cultures sarclées
(Schothorst, 1977; Lévesque et al. . 1987).
De vastes régions de sols organiques au Canada, aux États-Unis et
ailleurs, très rentables à l'heure actuelle, sont progressivement menacées par
l'humification et l'affaissement subséquent (Stephens et Speir, 1970; Mathur,
1982). À mesure que se décomposent, s'humifient et s'affaissent les sols, la
teneur en humus augmente, ce qui crée des sites de complexation dense pour
certains oligoéléments essentiels et de rétention de divers pesticides
utilisés pour la protection des cultures. De plus, la capacité de rétention
d'eau et la conductivité hydraulique des sols diminuent parce que les tourbes
- 26 -
humifiées sont plus compactes et retiennent moins bien l'eau que les tourbes
brutes. Parce que les sols s'affaissent, le drainage doit être périodiquement
intensifié et les champs, protégés contre les inondations (terrains plus hauts
ou plans d'eau avoisinants) .
COMMENT PROLONGER LA VIE UTILE DES SOLS ORGANIQUES
Même si la dégradation, la décomposition et l'affaissement des sols
organiques cultivés sont inévitables, parce qu'ils sont inhérents à leur
nature même, il existe des moyens de retarder la disparition des sols
organiques, par des pratiques de gestion appropriées ou des interventions
chimiques et biologiques innovatrices.
La méthode la plus évidente pour ralentir l'humification et
l'affaissement consiste à s'assurer que la surface de saturation sous les
champs reste élevée; en effet, l'eau exclut l'air, qui favorise la
décomposition biooxydante, et limite 1 'aff aisément physique de la couche
superficielle de flotter. Parce que cette méthode n'est pas entièrement sûre
cependant, la surface de saturation n'est généralement pas conservée assez
haut pour entraver efficacement la décomposition.
En Europe, du sable est versé sur des pâturages tourbeux afin d'aider à
réduire l'affaissement; on peut s'assurer que la surface de saturation reste à
l'interface minéral-organique et le sable est capable de porter le poids des
bêtes à cornes. Dans certaines tourbières minérotrophes utilisées pour la
culture des céréales, les champs sont inondés de l'automne au printemps afin
de permettre la sédimentation des matières minérales que contiennent les eaux
courantes. Ces matières minérales sont alors mélangées aux couches
organiques, ce qui aide à la stabilisation de l'humus.
Soulignons que, pour certaines cultures, le mélange d'une couche
superficielle organique aux composantes minérales qu'on retrouve sous les
cultures constitue une pratique d'amélioration de la majorité des sols
organiques lorsque cela est possible. Cette pratique est couramment utilisée
en Allemagne, en Hollande et dans l'est de l'Angleterre (East Anglia) où de
vastes portions de tourbières se trouvent généralement sur un sous-sol sableux
(Kuntze, 1980; Wind et Pot, 1976; Smith, 1969). Au Canada, la présence d'un
substratum sableux n'est pas aussi fréquente et plusieurs autres types de
couches sous-jacentes limniques et minérales s'observent; certains de ces
matériaux pourraient entraîner des problèmes par moments. Dans le cadre d'une
étude récente, (Lévesque et al. . 1988), les auteurs ont montré que le mélange
des couches superficielles organiques et de divers types de couches minérales
inférieures permet d'améliorer ces dernières. D'importantes chutes de
productivité à court terme des couches organiques superficielles peuvent être
évitées si l'on réduit l'apport (volume /volume) de la couche minérale à
environ 25 % au début, surtout dans le cas de l'argile. La présence de gyttja
est nuisible à l'aptitude culturale d'un sol organique, sauf là où s'observe
en même temps une couche de coquillages. Les améliorations produites par le
mélange des couches superficielles organiques aux couches minérales
comprennent l'amélioration de la structure.
- 27 -
L'humification et l'affaissement des sols organiques cultivés peuvent
être retardés d'environ 50 % par l'ajout graduel de cuivre (5 à 15
kg.ha~l.a~l) jusqu'à l'obtention, et au maintien, de concentrations de 100
à 400 ug.g~l dans des sols de densité apparente de 0,1 à 0,4 g. cm- 3
(Mathur, 1982; Mathur et Lévesque, 1983). Les auteurs ont montré que les
concentrations de cuivre nécessaires sont de beaucoup inférieures à celles
qui, d'après des études, entraînent des problèmes agricoles ou
environnementaux (Mathur, 1987). Le cuivre inactive les enzymes de
dégradation du sol organique qui en déterminent le taux de décomposition.
CHOIX DES CRITÈRES DE DÉTERMINATION DE LA VALEUR AGRONOMIQUE DES SOLS
ORGANIQUES
Un système de classification des aptitudes culturales, proposé récemment
par Mathur et Lévesque (1987) comporte sept facteurs permettant de choisir les
critères adéquats d'évaluation de la valeur agronomique des sols organiques.
Cinq des sept facteurs (tableau 1) sont liés aux propriétés inhérentes aux
matériaux tourbeux; en fait, ces facteurs ou critères pourraient être utilisés
en même temps que le paramètre de qualité du sol. Ce sont :
- le degré de décomposition (au sens botanique),
- la teneur en bois,
- la réaction (pH),
- l'épaisseur du dépôt,
- la nature des matériaux sous-jacents.
a) Degré de décomposition (au sens botanique)
On met beaucoup l'accent sur le degré de décomposition dans la
classification des tourbes, parce que ce critère est en corrélation avec toute
une série d'autres propriétés qui ont un effet sur la productivité
potentielle, nommément la densité, la capacité de rétention de l'eau, la
porosité, la conductivité hydraulique, la capacité portante, la capacité
d'échange cationique, etc.
Une tourbe mixte (mousse de sphaignes, un peu de bois et de carex) est
préférable à une tourbe composée uniquement de sphaignes. Par rapport aux
mésisols et aux humisols, les sphagno-fibrisols ont une capacité portante plus
faible et sont plus sensibles à l'affaissement, plus lents à se réchauffer,
plus difficiles à drainer, plus pauvres en éléments nutritifs et plus acides
mais ils ont une capacité de rétention de l'eau et une porosité plus élevées.
Les humisols, eux, ont une perméabilité faible, une conductivité hydraulique
très basse, mais une rétention d'ions et une capacité d'échange plus élevées.
Pour la culture des légumes, il faut environ cinq fois plus de
fertilisants azotés dans des sphagno-fibrisols que dans un mésisol ou un
humisol. Par contre, dans le cas des cultures maraîchères, le coût du N
supplémentaire ne représente qu'une faible part des coûts totaux. Les
fibrisols ont généralement des concentrations de Cu, Fe, Mn et Zn plus faible
que les autres sols organiques (Lévesque et Mathur, 1986). D'après les études
que nous avons réalisées récemment sur un grand nombre de sols, il semblerait
cependant que la disponibilité de ces éléments pour les plantes varie de bonne
- 28 -
à excellente dans les fibrisols à cause de l'absence de sites spécifiques à la
complexation reliés à l'humus (Mathur et Lévesque, 1988; Lévesque et Mathur,
1988). Parce que leur pH est généralement faible, on pense que les
sphagno-fibrisols ont besoin d'un apport plus grand en chaux; cependant, leur
densité apparente étant également faible, la quantité totale de chaux
nécessaire pourrait bien ne pas être si importante. La valeur agronomique et
la qualité des sphagno-fibrisols pourraient être meilleures que ce que l'on
avait pensé. La possibilité d'utiliser le paillage plastique pour les
améliorer, comme nous l'ont révélé nos travaux préliminaires, doit faire
l'objet d'autres études.
b) Teneur en bois
La présence de souches et de troncs crée un obstacle physique à la mise
en valeur et à la culture; on ne s'entend pas sur ce qui constitue des
quantités inacceptables de bois, mais il est sûr qu'il faut tenir compte de la
résistance à la décomposition (dureté), ainsi que de la profondeur à laquelle
il se trouve.
La présence de bois à la surface cause des problèmes : ensemencement et
germination non uniformes et interruption fréquente et bris occasionnel des
machines utilisées pour la récolte des cultures-racines. Par contre, la
présence de bois sous la couche arable est intéressante puisque le bois a une
perméabilité acceptable, rétricit moins par séchage et compression et se
décompose et s'affaisse plus lentement que la plupart des autres matériaux.
En d'autres mots, la présence de bois dans tout le profil ou près de la
surface entraînerait des problèmes plus graves et de plus longue durée que la
présence de bois dans la partie inférieure du profil.
c) Réaction (pH)
Un pH faible ou élevé a un effet négatif sur la disponibilité des
éléments nutritifs. Les quantités élevées de chaux nécessaires pour redresser
des pH faibles pourraient n'être pas si élevées qu'on le croit puisque les
sols organiques, à pH de 3 et de 4, seraient moins denses et auraient donc
besoin d'une moins grande quantité de chaux, en poids. Il faut souligner que
plusieurs cultures (pommes de terre et graminées) peuvent bien pousser dans
des sols organiques dont le pH est d'environ 4,0. De plus, parce que la CEC
des sols organiques est élevée, une plus grande quantité de Ca y est
disponible pour les plantes que dans un sol minéral pour des niveaux
semblables de saturation en base (Lévesque et Mathur, 1983; Mathur et
Lévesque, 1983). De plus, dans les sols organiques sans aluminosilicates,
même lorsque le pH est de 4,0, les teneurs en Al solubles ne sont pas
phytotoxiques.
d) Épaisseur du dépôt
L'épaisseur d'un sol organique est d'importance capitale lorsqu'il est
question de l'utiliser à long terme. Les 80 cm supérieurs sont généralement
situés au-dessus de la nappe phréatique dans un sol cultivé et sont
vulnérables à la biodégradation et à l'aff aisément. La nature des matériaux
situés
- 29 -
entre 80 et 200 cm de profondeur a un effet sur le mouvement de l'eau, donc
sur le choix du système de drainage requis. Un dépôt tourbeux de plus de
200 cm de profondeur devrait pouvoir être exploité pendant au moins 50 ans.
Dans le cas de sols moins épais, la mise en valeur n'est peut-être pas
économique.
e) Matériaux sous-iacents
La nature des matériaux minéraux sous-jacents constitue également une
importante considération lorsqu'il s'agit de planification à long terme,
notamment d'une utilisation continue après la disparition de la majeure partie
de la tourbe. Par exemple, si le substratum se compose de gyttja riche en
soufre réduit, en gravier ou en roc, il resterait peu de sol à valeur
culturale. Des sols organiques peu profonds auraient tendance à s'assécher là
où ils reposent sur des sols sableux, ou à entraîner la formation d'une nappe
phréatique perchée là où ils reposent sur des argiles compacts. Soulignons
cependant que le mélange de sols organiques et des couches sur lesquelles ils
reposent constitue, dans la plupart des cas, une pratique d'amélioration, nous
permettant d'obtenir des couches arables qui conviennent très bien pour la
production de céréales et de légumes (Lévesque et Mathur, 1985).
CHOIX DES CRITÈRES DE SURVEILLANCE CONTINUE DE LA QUALITÉ AGRONOMIQUE DES SOLS
ORGANIQUES
Les critères dont il vient d'être question pourraient servir à évaluer le
potentiel agricole et la variation de la qualité des sols organiques. Dans le
cas d'un usage agricole, la qualité du sol devrait être mesurée dans un
contexte dynamique; c'est-à-dire, comment le sol évolue, se modifie ou résiste
à la dégradation, à court et à long terme. Les critères devraient refléter
les avantages et les inconvénients de diverses pratiques culturales. Ces
critères devraient également montrer comment parvenir, de façon économique, à
une productivité fiable et comment la prévoir pour un climat et des cultures
donnés.
À l'heure actuelle, les données nécessaires au choix de ces critères sont
fragmentaires; il est donc nécessaire de recueillir des renseignements par le
suivi de divers types de sols organiques. Ce dernier devrait porter surtout
sur les changements qui ont un véritable effet sur : la capacité
d'emmagasinement et d'approvisionnement en eau et en éléments nutritifs, la
capacité de transmettre de l'eau et d'échanger des gaz, la capacité de
réaction à toute modification physique, chimique et environnementale, la
capacité d'adaptation à de nouvelles pratiques de gestion et de culture et la
capacité de production et de maintien de rendements acceptables. À cet égard,
une étude récente (Mathur et Lévesque, 1989) a montré que la qualité des sols
organiques (capacité d'emmagasinement de l'eau et des éléments nutritifs)
diminue en fonction de la durée de l'exploitation, même avant que des
problèmes de gestion de l'eau et des éléments nutritifs ne naissent,
probablement à cause d'une mauvaise aération du sol.
- 30 -
Au tableau 2 sont regroupées les propriétés dont la mesure est
susceptible de fournir des renseignements utiles sur la nature et l'état
dynamique des sols organiques cultivés. Certaines propriétés sont de nature
plus générale (par exemple degré de décomposition), d'autres permettent
d'indiquer les variations que connaît un sol, ou son évolution. Une
évaluation préliminaire des diverses propriétés a été réalisée (tableau 2).
Les chercheurs s'entendent généralement pour dire que le degré de
décomposition du matériel tourbeux en constitue la caractéristique la plus
marquée, que l'on considère le rôle naturel ou économique des sols
organiques. En effet, à l'exception de l'état d'agrégation et, peut-être du
pH, les 16 propriétés ou caractéristiques données au tableau 2 sont
directement liées à l'état de décomposition des matériels tourbeux, ou en
dépendent. Mathur et Farnham (1985) ont clairement montré ces liens dans leur
article portant sur les diverses façons de mesurer le degré d'humification ou
de décomposition des sols organiques.
Idéalement, les 16 propriétés devraient être mesurées dans des sols
représentatifs. Les mesures réalisées dans des sols cultivés devraient être
pondérées en fonction du rendement de ces sols. De plus, la surveillance
continue devrait porter sur une période de plusieurs années, permettant
d'arriver à des résultats concluants. Il ne sera pas nécessairement possible
d'effectuer toutes les mesures pour tous les sols et toutes les cultures
nécessaires. Il faudrait cependant effectuer suffisamment de mesures pour
permettre de bien choisir les critères. Nous espérons pouvoir établir
quelques indicateurs fiables assez rapidement après le début du suivi afin de
mieux orienter celui-ci.
EN GUISE DE CONCLUSION
Les auteurs, on l'a vu plus haut, soulignent l'existence d'une certaine
quantité d'information sur l'évolution de la tourbe, les changements apportés
par la culture, les pertes et les gains liés à diverses pratiques culturales
et de gestion. La présente étude vise, par la réalisation de mesures et la
surveillance continue des propriétés des sols organiques, à découvrir où et
quand l'une des propriétés du sol commence à en limiter la qualité; cela se
manifeste par une diminution du rendement. Par exemple, à quel moment le
rendement d'une culture commence-t-il à diminuer parce que le sol n'est pas
assez épais? Que peut-on dire alors de la qualité du sol? Il est
véritablement nécessaire d'obtenir de bonnes données de base permettant de
définir et d'évaluer de façon pratique et sûre la qualité d'un sol en vue
d'une productivité viable.
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Tableau 1. Guide modifié de classification des sols organiques selon leurs possibilités
agricoles (Mathur et Lévesque, 1987)
1. Décomposition
Teneur en bois
Facteurs Points de désavantage
Fibres frottées C'A)
Fibrique >60 % sphaignes majoritaires 25
40 à 60 % sphaignes majoritaires 20
40 à 60 % sphaignes non majoritaires 10
Mésique 20 à 40 % n'importe quel matériau 0
10 à 20 % n'importe quel matériau 10
Humique <10 % 20
Présence de bois (en volume %)
Aucun 0
1 à 25 % sous 80 cm 5
1 à 25 % au-dessus de 80 cm 10
25 à 50 % sous 80 cm 10
25 à 50 % au-dessus de 80 cm 20
>50 % sous 80 cm 20
>50 % au-dessus de 80 cm 35
20
10
0
10
20
0
10
20
30
5. Matériaux sous-.iacents (épaisseur >20 cm) situés à 3 m de la surface
silt, loam 10
sable 15
argile 20
Gyttja, tourbe sédimentaire ou coprogène
sans couche contiguë riche en coquillages 50
Gyttja, tourbe sédimentaire ou coprogène avec
couche contiguë (>20 cm) riche en coquillages 10
ou de marne
Couche de marne ou riche en coquillages 10
Roc 50
Pierrosité (<10 %) dans la couche inférieure
minérale 5
Gravier ou > 30 % de pierres dans l'une des
couches inférieures 30
3.
Réaction
pH
<3,5
3,5 à 5,0
5,0 à 6,5
6,5 à 7,5
>7,5
4.
Épaisseur du dépôt organique
>200 cm
120 à 200 cm
80 à 120 cm
<80 cm
Tableau 2.
- 37 -
Liste préliminaire des critères utiles au suivi de la qualité
agronomique des sols organiques.
(*** = plus pertinent)
( * = moins pertinent)
Critères
Pertinence de
1' indicateur
a court -
moyen ou
long terme
1. Degré de décomposition
- fibres frottées (%)
- indice PP (pyrophosphate)
2. Teneur en cendre
3. Réaction (pH)
4. Densité apparente
5. Capacité portante
6. Rapport carbone: azote
7. Affaissement :
- vitesse
- diminution relative de niveau
8. Taux de respiration
9. Activité de la phosphatase
10. Rapport teneur en sucre: carbone total
11. Rapport C aliphatique:C phénolique
12. Valeur calorifique
13. Capacité de rétention d'eau
14. Conductivité hydraulique
15. Porosité - rapport macro-pores :micro-pores
16. Proportions de matériaux fins
17. Aspects micromorphologiques:
- Rapport matériaux amorphes :matériaux
structurés
- Rapport matériaux monomorphes:matériaux
hétéromorphes
18. État d'agrégation :
coalescence des matériaux humiques
***
**
**
**
**
**
**
***
**
***
**•
**
M
M
S
M
M
S
M
S
S
M
M
M
S
S
M
S
L
**
- 38 -
MATIÈRE ORGANIQUE ET QUALITÉ DU SOL
M. SCHNITZER
1. Introduction
On appelle matière organique du sol l'ensemble de toutes les substances,
renfermant du carbone organique, présentes dans les sols. La teneur en
carbone organique des sols varie de moins de 0,1 % dans les sols désertiques à
près de 100 % dans les sols organiques. Au Canada, un sol agricole typique
peut contenir 2 à 5 % de matières organiques dans les 15 cm supérieurs.
La matière organique du sol se compose d'un mélange de résidus végétaux
et animaux à divers stades de décomposition, de substances synthétisées
microbiologiquement ou chimiquement, ou les deux, de produits de dégradation,
de microorganismes, de petits animaux et des restes de leur décomposition
(Schnitzer et Khan, 1972). Pour simplifier ce système très complexe, on peut
classer la matière organique en deux catégories : a) les substances non
humiques et b) les substances humiques.
Les substances non humiques comprennent celles dont les caractéristiques
chimiques sont encore reconnaissables, notamment les glucides, les protéines,
les peptides, les acides aminés, les purines, les pyrimidines, les graisses,
les acides gras, les alcanes, les cires, les résines, les pigments et autres
composés organiques de faible poids moléculaire. Ces composés se dégradent en
général relativement facilement dans les sols et ont de courtes durées de vie.
La majeure partie de la matière organique du sol se compose toutefois de
substances humiques qui sont des matériaux amorphes surtout hydrophiles, dont
la chimie est complexe, et qui s'apparentent à des polyélectrolytes. Leur
poids moléculaire varie de quelques centaines à plusieurs milliers (Schnitzer,
1978). Les substances humiques ne présentent plus les caractéristiques
physiques et chimiques particulières, normalement associées à des composés
organiques bien définis, mais sont plus résistantes à la dégradation chimique
et biologique que ne le sont les substances non humiques.
Avant de se pencher sur les effets de la matière organique sur la qualité
du sol, il semble approprié de décrire la composition chimique de la matière
organique.
2. Composition de la matière organique du sol
Voici des estimations de la composition moyenne de la matière organique
d'un sol minéral canadien typique : glucides - 10 %; composés azotés - 10% (y
compris les protéines, les peptides, les acides aminés, l'ammoniac, les
purines, les pyrimidines et les substances azotées non identifiées); alcanes,
acides gras, graisses, cires, résines, etc. - 10 %; substances humiques (acide
humique, acide fulvique, humine) - 70 %. Ces chiffres peuvent varier d'un
endroit à l'autre.
- 39 -
Nous traiterons dans les paragraphes suivants de chacun des groupes des
composantes principales de la matière organique.
2.1 Glucides
Les glucides se présentent essentiellement, dans la matière
organique, sous forme de polysaccharides (Cheshire, 1979). Ces
polysaccharides, après hydrolyse acide produisent des hexoses (glucose,
galactose, mannose), des pentoses (arabinose, ribose, xylose), des
désoxyhexoses (fucose et rhamnose), des acides uroniques (acide glucuronique
et galacturonique) en plus de petites quantités de fructose et de méthyloses
(2-0-méthyle-L-rhamnose et 4-0-méthyle-D-galactose) . De petites quantités
d'alcool de sucre (mannitol et inositol) ont également été trouvées. Les
hydrolysats de la matière organique du sol renferment généralement aussi les
deux amino-sucres (glucosamine et galactosamine) et parfois également des
traces d'acide muramique (Cheshire, 1979; Stevenson, 1982).
Mises à part les traces de sucres hydrosolubles, on ne peut isoler
facilement les glucides des sols parce qu'ils sont intimement liés aux
composantes non glucidiques. Il n'est pas clair à l'heure actuelle si les
glucides constituent un mélange hétérogène de divers polysaccharides
renfermant des sucres différents ou s'ils consistent en un seul polysaccharide
homogène complexe renfermant divers sucres. Les glucides proviennent de
résidus animaux et végétaux et de gomme excrétée par les cellules des
microorganismes (Cheshire, 1979).
Parmi toutes les composantes de la matière organique du sol, les
polysaccharides sont les plus facilement disponibles comme sources d'énergie
pour les microorganismes.
2.2 Composés azotés
L'azote est le seul élément nutritif essentiel qui ne soit pas issu
de l'altération des minéraux; il provient de l'atmosphère où il est le
principal gaz (79 %) (Schnitzer, 1985). Seuls quelques microorganismes
peuvent utiliser le N2 moléculaire; tous les autres organismes vivants ont
besoin de N combiné à d'autres éléments pour survivre. Le sol s'enrichit en
azote par fixation de molécules de N2 dans les microorganismes et par
l'apport en ammoniac et en nitrates contenus dans l'eau de pluie. Le sol
s'appauvrit en azote par prélèvement à cause des cultures, du lessivage et de
la volatilisation. La conversion de molécules de N2 se produit par la
fixation de l'azote biologique. À leur tour, des formes organiques de N sont
converties par ammonification et nitrification respectivement en NH3 et
NO3 ~. Presque tout l'azote du sol est combiné ou étroitement associé à
la matière organique. Dans un sol typique canadien, la répartition moyenne de
N est la suivante : N-acides aminés : 30 %; N-sucres aminés : 3 %; N
ammoniacal : 23 %; N dans les purines et les pyrimidines : 2 %; N non
identifié : 42 % (Schnitzer, 1985). Si l'on suppose que la moitié du NH3-N
provient de structures complexes renfermant du N, 53 % du N total de la
matière organique du sol reste indéterminé. D'après certaines études
réalisées récemment, une part du N indéterminé est présent dans les anneaux
- 40 -
hétérocycliques dans la matière organique. L'importance de l'azote dans les
sols est de toute évidence liée au fait qu'il s'agit d'une composante
importante des prot ines, des acides nucl igues, des porphyrines et des
alcaloïdes. Il demeure préoccupant que nous ne sachions pas sous quelle
forme se présente environ la moitié du N organique qui se trouve dans de
nombreux sols agricoles; des études seraient donc nécessaires afin de
déterminer de façon précise toutes les formes de N dans le sol.
2 .3 Alcanes et acides gras
La matière organique du sol renferme divers groupes de lipides qui
vont des alcanes simples et des acides gras aux stérols, aux terpènes, à la
chlorophylle, aux matières grasses, aux cires et aux résines (Stevenson,
1982). Comme les lipides sont hydrophobes, ils peuvent altérer les propriétés
physiques du sol. Des extraits de sols obtenus dans des conditions
supercritiques au n-pentane renferment des alcanes cycliques et des n-alcanes
à longue chaîne linéaire (Schnitzer et al. f 1986). Les principales
composantes sont cependant des acides gras hydroxy et dicarboxylique
insaturés, ramifiés et à longue chaîne normale d'origine microbiologique. Des
spectres de [l^cjRMN de divers types de matières organiques du sol révèlent
la présence d'importantes concentrations de structures aliphatiques qui
pourraient comporter des cires complexes.
2 .4 Substances humiques
Il s'agit de matériaux de type polyélectrolyte, à chimie complexe,
qui sont amorphes, foncés, partiellement aromatiques et surtout hydrophiles;
ils constituent la majeure partie de la matière organique en poids.
Les substances humiques sont généralement classées en trois fractions
selon leur solubilité dans les acides et les bases : I) l'acide humique (AH),
qui est soluble dans les bases diluées, mais coagule à l'acidification de
l'extrait alcalin; II) l'acide fulvique (AF), la fraction qui reste en
solution lorsqu'on acidifie l'extrait alcalin, c'est-à-dire la fraction qui
est soluble à la fois dans les bases et les acides dilués et III) l'humine, la
fraction humique qui ne peut être extraite du sol par base ou acide dilué
(Schnitzer, 1978; Stevenson, 1982). Sur le plan chimique l'AH renferme plus
de C et de N mais moins de groupes C02H et moins de 0 que l'AF; de plus il a
un poids moléculaire plus élevé que l'AF. Il y a relativement peu de
différence en ce qui concerne les teneurs en H et en S ainsi que les
concentrations des groupes OCH3, C = 0 et OH phénolique. D'après les
données publiées et des données de [13C]RMN plus récentes, il semblerait que
les caractéristiques analytiques des humines soient semblables à celles des
acides humiques.
Selon d'importantes études chimiques et spectroscopiques, 50 à 60 %
du poids des matériaux humiques se composeraient de structures aromatiques
auxquelles se substituent de nombreux groupes C02H et OH (Schnitzer, 1978).
Ces structures s'associent grâce à des liens à énergie relativement faible
pour former un réseau dans lequel sont absorbés les alcanes, les acides gras,
les glucides et les composants azotés. Les particularités de la structure
- 41 -
humique sont sa flexibilité moléculaire et sa capacité d'interaction, grâce à
des groupes fonctionnels renfermant de l'oxygène, avec d'autres composantes
organiques et inorganiques des sols. Les substances humiques sont donc de
bons agents de complexation naturels qui possèdent des surfaces de réaction
relativement importantes. Ils sont également d'excellents dispersants et
peuvent servir aussi bien d'oxydants que d'agents de réduction. Les
substances humiques sont plus résistantes à la biodégradation dans le sol que
ne le sont les biopolymères (glucides et protéines). La stabilité des
substances humiques résulte de leur arrangement structural compliqué, qui
semble les protéger d'une grande hydrolyse enzymatique, de la formation de
complexes avec les cations polyvalents et du fait qu'ils sont absorbés sur les
minéraux argileux.
2.5 Phosphore et soufre
Le P et le S sont d'autres éléments nutritifs des plantes que l'on
retrouve dans la matière organique du sol.
Le P entre en jeu dans presque toutes les voies métaboliques
importantes; il est de plus une composante de la structure des acides
nucléiques, des coenzymes, des phosphoprotéines et des phospholipides (Tate,
1985). Le P est présent dans les sols sous toute une variété de formes.
L'anion orthophosphate interagit avec la matière organique du sol, les
carbonates solides, les minéraux argileux et les hydroxydes et oxydes d'Al et
de Fe. De petites quantités de P condensé, essentiellement d'origine
microbienne, s'observent sous forme de pyrophosphates et de polyphosphates
supérieurs. Entre 20 et 70 % du phosphate total des horizons superficiels de
la plupart des sols sont sous forme organique, notamment des esters d'acide
phosphorique et des hexa-phosphates et penta-phosphates d'inositol. De plus,
des phospholipides et des nucléotides sont présents dans les sols en
concentrations faibles. Mises à part des traces de glycophosphates, de
phosphoprotéines et de glycérophosphates, ainsi que de faibles quantités de
phosphonates, la nature chimique d'au moins 30 % du P organique reste inconnue
(Tate, 1985). Il est probable que les formes non déterminées de P organique
se présentent dans des complexes insolubles avec des minéraux argileux, des
oxydes hydratés et de la matière organique du sol.
Il semble que le P organique doit être minéralisé pour être
disponible pour les plantes. Certaines formes de P organique récemment
établies par [31p]RMN comprennent des diesters d* orthophosphate mais pas
d'esters d' orthophosphate. La minéralisation du P organique en P inorganique
est effectuée par des microorganismes et des enzymes. Les activités de
phosphatase sont généralement nombreuses dans la rhizosphère parce que les
populations microbiennes y sont plus élevées et que des phosphatases végétales
y sont présentes. Les plantes utilisent également d'autres moyens :
ramification des racines, poils radiculaires et rapports symbiotiques avec des
mycorhizes, pour extraire le P du sol. D'après des estimations récentes des
taux annuels moyens de minéralisation du P organique dans trois sols arables
anglais, environ un tiers de l'absorption moyenne de P par les cultures
pourrait provenir de la matière organique du sol par minéralisation (Chater et
Mattingly, 1979). D'après des estimations antérieures, la matière organique
- 42 -
dans les sols arables anglais pouvait fournir 6 kg P ha"1 et du P organique
minéralisé pouvait fournir 15 kg P ha-1 pour des sols de prairies (Gasser,
1962). La minéralisation et l'immobilisation du P dans les sols sont des
processus biologiques importants qui en contrôlent la disponibilité pour les
plantes.
La teneur en S des sols varie de 0,002 à 3,5 % (Scott, 1985). Les
plantes ont besoin de cet élément pour produire les protéines, les vitamines,
la chlorophylle, l'huile glycocydique et des liens sulfure structurellement et
physio logiquement importants comme les parois cellulaires et les groupements
sulfhydryles. Pour obtenir un rendement maximum de luzerne il faut une part
de S pour chaque 11 à 12 parts de N (Biederbeck, 1978). Les plantes tirent
essentiellement le S des feuilles sous forme de sulfate dissous et, dans une
moindre mesure, de l'atmosphère par absorption foliaire de SO2. Le cycle du
S ressemble à celui du N en ce qu'il possède une importante composante
atmosphérique et parce qu'il est associé à la matière organique du sol; il est
cependant différent en ce qu'il est surtout disponible par la plante par
altération des minéraux (Biederbeck, 1978). Plus de 90 % du S total dans la
plupart des sols non calcaires sont présents sous forme organique, dont :
a) Le S organique, réduit en H2S par un traitement à l'acide
iodhydrique. Sont compris les esters de sulfate et les éthers sous forme de
sulfate phénolique, de polysaccharides sulfatés, de sulfates de choline et de
lipides sulfatés; on considère que c'est la forme la plus labile du S
organique.
b) Le S organique, réduit en sulfure inorganique par nickel Raney.
Cette fraction semble se composer essentiellement d'acides aminés contenant
des S, comme la cystéine et la méthionine.
c) Le S organique, non réduit par acide iodhydrique ou nickel Raney.
Il se présenterait sous forme de composés à liens C-S très résistants.
Les principales formes sulfatées dans les sols calcaires sont les
sulfates de Mg, de Ca et de Na hydrosolubles. Les principaux facteurs qui
modifient l'adsorption des sulfates dans les sols sont le pH, la teneur en
oxyde de Fe et d'Al et la concentration de sulfates. On retrouve souvent les
sulfates sous forme d'impuretés coprécipitées et cocristallisées du CaCÛ3,
qui sont insolubles. Seuls les sulfates hydrosolubles et adsorbés semblent
disponibles pour les cultures.
Dans les sols, les transformations du S résultent essentiellement
d'activités microbiennes, bien qu'une oxydation chimique soit également
possible. Les principaux processus microbiens sont (Scott, 1985) :
a) La minéralisation : dégradation des grosses molécules organiques
renfermant du S en molécules plus petites, puis en sulfate inorganique.
b) L'immobilisation : conversion des molécules inorganiques simples
renfermant du S en composés organiques renfermant du S.
- 43 -
c) L'oxydation : conversion des composés inorganiques de S peu oxydés
en sulfates.
d) La réduction : réduction du sulfate et des composés intermédiaires
en sulfure.
À cause de l'utilisation des combustibles fossiles, des quantités de
plus en plus importantes de S sont ajoutées à l'atmosphère, dont la majeure
partie sous forme de SO2. Environ la moitié du SO2 est oxydée et retombe
avec les précipitations sous forme de H2SO4, alors que l'autre moitié
retombe en poussière sur la végétation, le sol ou l'eau, soit par adsorption
directe du gaz, soit sous forme de matières particulaires. Le SO2 est
ensuite oxydé. Le S atmosphérique peut avoir des effets néfastes sur
l'environnement parce que sa teneur est très élevée par endroits. Des effets
toxiques directs de grandes concentrations de SO2 sur la végétation et des
effets indirects des pluies acides sur le biote aquatique et terrestre ont été
signalés. Bien que les oxydes azotés contribuent jusqu'à 30 % de l'acidité
des précipitations, c'est l'apport en S qui préoccupe le plus. Le S et le N
peuvent être bénéfiques pour les sols, et si ce n'était pas de l'apport
atmosphérique, des quantités considérables de S et de N supplémentaires
auraient besoin d'être ajoutées au sol pour obtenir une croissance optimale
des cultures (Scott, 1985).
3. Effets de la matière organique sur la qualité du sol
La matière organique du sol exerce trois effets principaux sur la qualité
du sol :
a) des effets physiques relativement à l'agrégation du sol, l'érosion, le
drainage, l'état physique, l'aération, la capacité de rétention d'eau, la
densité apparente, l'évaporation, la perméabilité, les propriétés mécaniques,
etc.
b) des effets chimiques liés à la capacité d'échange, la complexation des
métaux, la capacité tampon, l'approvisionnement en N, P, S et oligoéléments,
et leur disponibilité, 1' adsorption de pesticides et autres produits chimiques
agricoles, etc.
c) des effets biologiques sur les activités des bactéries, des
champignons, des actinomycètes, des vers de terre, des racines, des poils
radiculaires, de la biomasse, etc.
Chacun de ces effets sera traité plus en détail dans les pages qui
suivent.
3.1 Effets physiques
La culture intensive a tendance à réduire la teneur en matière
organique du sol, ce qui a un effet néfaste sur les caractéristiques
structurales du sol, notamment la taille des pores et des agrégats, la
- 44 -
stabilité des agrégats et une plus grande vulnérabilité à la compaction et
enfin, la consolidation par humectation et séchage. La détérioration des
caractéristiques structurales conduit à une diminution de la productivité
parce qu'elle limite la croissance des racines, l'aération du sol et le
drainage. La structure idéale du sol serait un assemblage poreux, friable et
peu compact d'agrégats qui permettrait la libre circulation de l'air et de
l'eau et faciliterait la culture, la plantation et la libre germination et la
croissance des racines.
On peut définir la structure du sol comme étant la taille et
l'arrangement des particules et des pores dans les sols (Oades, 1984). Un sol
convient bien pour la croissance des plantes lorsque sa structure est telle
que les pores peuvent emmagasiner de l'eau pour les plantes, faire circuler
l'air et l'eau et laisser pousser les racines. Idéalement, la majeure partie
de la fraction argileuse d'un sol cultivé devrait se présenter sous forme de
microagrégats floculés (<250 mu) liés entre eux et à d'autres particules
pour former des macroagrégats (>250 mu) . Le diamètre de la plupart des
macroagrégats devrait varier de 1 à 10 mm (Oades, 1984). La dégradation des
macroagrégats à 1 'humectation, à cause de la présence d'air emprisonné et du
gonflement inégal est dite désagrégation. La désagrégation entraîne une
diminution de l'infiltration des pluies ou de l'eau d'irrigation et de la
conductivité hydraulique et a un effet sur la stabilité des microagrégats.
L'agrégation comporte le resserrement de particules du sol et la
cimentation de ces particules par des agents liants en unités indépendantes.
Les agents de liaison peuvent être organiques ou inorganiques.
3.1.1 Agents de liaison inorganiques
L'argile peut lier les particules en agrégats, mais ceux-ci perdront
probablement leur forme à 1 'humectation. Les oxydes hydratés de fer et
d'aluminium cimentent les particules en agrégats stables dans l'eau dont les
diamètres sont supérieurs à 100 um, surtout dans les sols qui renferment
plus de 10 % de sesquioxydes. Des aluminosilicates très désordonnés et des
carbonates de calcium agissent aussi comme liants. L'efficacité du carbonate
de calcium pourrait être due, en partie, à la présence de concentrations
relativement élevées de Ca dans la solution du sol qui limitent la dispersion
et le gonflement.
3.1.2 Agents de liaison organiques
Dans les couches superficielles de nombreux sols agricoles, la
matière organique du sol semble jouer un rôle important dans la cimentation
des agrégats. Tisdall et Oades (1982) classent les liants organiques selon
qu'ils sont transitoires, temporaires ou persistants.
Les agents de liaison transitoires, décomposés rapidement par des
microorganismes, comportent les polysaccharides microbiens produits par
l'ajout de divers matériaux organiques au sol, ainsi que les polysaccharides
associés aux racines et à la biomasse microbienne dans la rhizosphère. Les
polysaccharides se forment et se décomposent rapidement; ils sont liés à de
- 45 -
gros agrégats (>250 um de diamètre) stables passagèrement. Les
polysaccharides peuvent être protégés de l'oxydation microbienne par
association avec des ions métalliques, des tannins, des matériaux humiques ou
par sorption sur des surfaces argileuses; ils persistent alors durant
plusieurs années. Le rôle important de liaison que jouent les polysaccharides
dans l'agrégation dans les sols a été souligné à de nombreuses reprises
(Cheshire, 1979; Tisdall et Oades, 1982; Oades, 1984; Stevenson, 1982). De
nombreux microorganismes produisent des mucilages ou gommes exocellulaires qui
sont surtout des polysaccharides. Il est clair que dans certains sols,
d'autres liants organiques ou même des ciments inorganiques sont actifs
(Tisdall et Oades, 1982). Cela est particulièrement vrai dans le cas des
agrégats dont le diamètre est supérieur à 50 um. Ajoutons que les
polysaccharides jouent un rôle de liaison moins important dans les sols riches
en matière organique.
Les racines et les hyphes, notamment les hyphes micorhiziens
vésiculeux et arborescents sont des liants temporaires (Tisdall et Oades,
1982). Ces agents de liaison s'accumulent dans le sol en quelques semaines ou
quelques mois à mesure que le système racinaire et les hyphes qui leur sont
associés croissent puis persistent durant des mois et même des années. Les
pratiques culturales du sol ont un effet sur ces liants. Non seulement les
racines approvisionnent le sol en résidus organiques décomposables et font
vivre une importante population microbienne dans la rhyzosphère, mais elles
servent également d'agents de liaison. Les racines, même une fois mortes,
emprisonnent les particules fines en macroagrégats stables. Les résidus
provenant des racines se présentent sous forme de racines secondaires fines,
de poils radiculaires, de cellules desquamées de la coiffe, de cellules
mortes, de mucilages, de lysats et de matériaux volatils et hydrosolubles. La
présence de plantes peut également faire augmenter de façon indirecte la
résistance à l'eau des agrégats parce qu'elles nourrissent les animaux
terricoles (vers de terre et mésofaune), leur permettant de former de larges
populations. Les vers de terre peuvent stabiliser la structure du sol en
l'ingérant et en le mélangeant intimement à des matériaux organiques humifiés
dans son tube digestif. Les hyphes fongiques stabilisent également les
macroagrégats. Dans les sols désertiques, des filaments d'algues bleues, des
lichens et des hyphes fongiques peuvent stabiliser les sols contre l'érosion.
Les agents de liaison persistants sont des matériaux humiques,
partiellement aromatiques, dégradés, associés à des aluminosilicates, de
l'aluminium et du fer amorphes. Les agents de liaison persistants comprennent
probablement des complexes d'argile - métaux polyvalents - matière organique,
A-M-MO et (A-M-M0)x (Edwards et Bremner, 1964), dont le diamètre est
inférieur à 250 um (Tisdall et Oades, 1982). Ces liants proviennent
probablement de fragments résistants de racines, d 'hyphes, de cellules et de
colonies bactériennes (c'est-à-dire d'agents de liaison temporaires) qui se
sont formés dans la rhyzosphère. La matière organique du sol serait le centre
de l'agrégat et les particules d'argile fine y seraient adsorbées, plutôt que
l'inverse (Tisdall et Oades, 1982). Parmi les autres liants persistants, on
retrouve les polysaccharides et les matériaux organiques stabilisés par
association à des métaux, des oxydes hydratés et des minéraux argileux.
- 46 -
3.1.3 Organisation des agrégats
La formation d'agrégats stables à l'action de l'eau passe par la
floculation des particules argileuses en domaines. La matière organique du
sol relie les domaines en microagrégats (Oades, 1984).
D'après Edwards et Bremner (1967), les macroagrégats (diamètre
> 250 um) se composeraient de complexes d'argile-métaux
polyvalents-matière organique (A-M-MO) où l'argile est liée, par des métaux
polyvalents, à la matière organique humifiée. Des particules d'A-M-MO et
d'(A-M-M0)x forment des microagrégats [(A-M-M0)x]y dont le diamètre est
inférieur à 250 um. Des liaisons A-M-A et MO-M-MO et même des liaisons
d'oxyde d'aluminium et de fer ou de liens hydrogènes peuvent également se
présenter. Tisdall et Oades (1982) ont proposé un modèle d'organisation des
agrégats selon quatre stades : <0,2 um ■• 0,2-2 um ■* 2-20 um -
20-250 um - >2 000 um.
Les particules résistantes à l'action de l'eau et dont le diamètre
est inférieur à 0,2 um se présentent souvent sous forme de flocs où les
plaquettes individuelles d'argile sont agglutinées et forment une masse
floconneuse. Certaines particules sont des agrégats de matériaux très fins
cimentés par de la matière organique et des oxydes de fer. La matière
organique est adsorbée fermement à la surface des argiles. Les agrégats sont
formés d'unités structurales de diverses tailles, cimentées par des agents de
liaison.
Les agrégats résistants à l'action de l'eau dont le diamètre est
compris entre 2 et 20 um se composent de particules, de diamètre inférieur à
2 um, étroitement liées par de la matière organique. La micrographie
électronique de sols ou de minces couches de sols permet de voir des bactéries
ou des colonies entourées d'une capsule composée de glucides et de substances
graisseuses et azotées à laquelle est fermement fixée de l'argile fine. Ces
agrégats sont formés de cellules bactériennes vivantes et de particules
argileuses, ce qui explique pourquoi une large part de la biomasse microbienne
est présente dans la fraction limoneuse. Puisque environ seulement 2 % de la
matière organique compose la biomasse (Jenkinson et Rayner, 1977), les
agrégats de la taille des limons renfermant des bactéries vivantes doivent
être «jeunes». Après la mort et la décomposition des bactéries, des
composantes fibreuses caractéristiques de la capsule bactérienne restent en
place et lient les particules argileuses. Des fragments d'hyphes fongiques
peuvent également entraîner la formation de petits agrégats stabilisés par des
débris fongiques.
Les agrégats dont le diamètre est compris entre 20 et 250 um se
composent largement de particules de 2 à 20 um de diamètre liées par divers
ciments, y compris des matériaux organiques persistants, des oxydes
cristallins et des aluminosilicates très désordonnés.
Les agrégats dont la taille est supérieure à 2 000 um sont cimentés
par de fins réseaux de racines et d'hyphes; leur stabilité est contrôlée par
les pratiques agricoles. Les agents de liaison inorganiques jouent un rôle
moins important.
- 47 -
Contrairement à ce qui se produit pour les macroagrégats, la
formation des microagrégats n'est pas touchée par les variations de la matière
organique résultant de diverses pratiques agricoles; en effet, la formation de
macroagrégats, qui dépend en grande partie des racines et des hyphes, est
contrôlée par les pratiques cultures. Le nombre de macroagrégats stables
diminue à mesure que baisse la teneur en matière organique du sol ou que se
décomposent sans être remplacés les racines et les hyphes.
3.1.4 Effet de la matière organique du sol sur les propriétés mécaniques
D'après De Kimpe et al. , (1982) la présence de matière organique du
sol en réduit la compaction et l'aff aisément, phénomènes qui sont liés à la
capacité relativement élevée de rétention d'eau de la matière organique. En
effet, d'après leur étude de 21 sols arables cultivés au Québec, la majeure
partie de la rétention d'eau à la capacité au champ se faisait grâce à la
matière organique plutôt qu'à la teneur en argile. De plus, les corrélations
entre certains paramètres liés à l'eau (teneur en eau optimale, limites de
liquidité et de plasticité) étaient toujours meilleures avec la matière
organique qu'avec la teneur en argile pour ces sols. De Kimpe et al ont
conclu que les deux variables qui ont un effet sur la densité apparente
optimale, c'est-à-dire capacité maximale de déformation par compaction et
résistance maximale à la déformation par affaissement des sols, sont
contrôlées par la matière organique du sol. Toute recommandation visant à
optimiser la praticabilité d'un sol et ses propriétés culturales doit tenir
compte de la teneur en matière organique du sol.
3.1.5 Adsorption de l'eau par la matière organique du sol
Les substances humiques, principales composantes de la matière
organique du sol, peuvent adsorber de grandes quantités d'R^O (Schnitzer,
1986). Pour une humidité relative (HR) de 90 %, 1,0 g d'AH adsorbe 225 mg
d'H20, et 1,0 g d'AF adsorbe 508 mg d'I^O. L'adsorption se fait en trois
étapes : a) adsorption d'une seule couche d'eau jusqu'à ce que l'HR atteigne
35 %; b) adsorption d'une autre couche d'eau jusqu'à ce que l'HR atteigne
entre 35 et 60 % et c) adsorption de deux autres couches d'^O par l'AH et
de six autres couches d'^O par l'AF, les couches d'H^O étant liées par de
l'hydrogène (pour une HR > 60 %). L'adsorption de l'^O sur les matériaux
humiques est un mécanisme coopératif, c'est-à-dire que plus le nombre de
molécules d'^O absorbées est élevé, plus il est facile pour d'autres
molécules d'être adsorbées. La présence dans les matériaux humiques d'un
grand nombre de groupes fonctionnels renfermant de l'oxygène, surtout les
groupes CO2H, aide à l'adsorption de l'^O parce qu'il y a beaucoup
d'oxygène et d'hydrogène permettant de former des liaisons hydrogènes avec
l'H20. La capacité de rétention élevée de l'eau est considérée par de
nombreux chercheurs (Johnston, 1982) comme étant l'une des plus importantes
caractéristiques de la matière organique. Ainsi, de la matière organique bien
humifiée peut retenir jusqu'à quatre fois son poids en eau (Vaughan et
Malcolm, 1985).
- 48 -
3.2 Effets chimiques
3.2.1 Perte de carbone et d'azote résultant de la culture du sol
La culture intensive du sol provoque une réduction de la teneur
initiale en matière organique qui tend vers un équilibre; cet équilibre varie
selon la quantité de matière organique ajoutée, le climat, l'activité
anthropique et l'environnement du sol (Jenny, 1941). En Amérique du Nord, la
teneur en matière organique du sol n'a pas encore atteint son équilibre. Dans
l'ouest du Canada, après 60 à 80 ans de culture du sol, la concentration de
carbone organique dans l'horizon Ap des sols chernozémiques a diminué de 50 à
60 % et celle d'azote organique, de 40 à 50 % (Campbell et al., 1976). La
mise en culture des Prairies vierges a provoqué une décomposition rapide de la
matière organique du sol et une diminution du taux d'addition de substances
organiques de sorte que la concentration d'équilibre de la matière organique a
diminué pour atteindre celle que pouvait supporter le nouvel écosystème. Les
systèmes et pratiques agricoles en usage dans les Prairies canadiennes ont
donné lieu à une diminution prononcée de la matière organique du sol pour les
deux raisons suivantes : les apports au système ont diminué par rapport à la
situation qui prévalait avant la culture du sol et le travail intensif du sol
a accéléré l'érosion (PFRA, 1983). Les auteurs du rapport PFRA (1983)
soulignent que les jachères ont eu un effet particulièrement néfaste sur la
teneur en matière organique du sol. Dans ce rapport, on considère la jachère
comme une forme extrême de travail intensif du sol qui diminue la quantité de
résidus végétaux pouvant retourner dans le sol, accélère la perte de la couche
arable par les vents et l'érosion qui à leur tour causent la décomposition de
la matière organique et la perte de précieux éléments nutritifs d'origine
végétale, augmente le lessivage et la dénitrification, provoque la perte
d'azote minéral libéré par la matière organique du sol et accélère la perte de
matière organique. Campbell et Paul (1978) ont montré que la minéralisation
annuelle de l'azote est de 104 kg de N l'hectare dans un sol en jachère alors
qu'elle est de 52 kg de N l'hectare dans un chernozème brun en culture. Dans
le même ordre d'idées, Dormaar (1979) signale que les systèmes de culture dans
lesquels on alterne la culture du blé et la jachère font perdre jusqu'à 60 %
du carbone organique des horizons Ah de certains sols des Prairies et il fait
observer qu'une augmentation de la fréquence des jachères dans les cultures en
rotation se traduit généralement par une diminution plus rapide de la matière
organique du sol. Ridley et Hedlin (1968) avaient déjà observé le même
phénomène en 1968. En effet, après 37 ans, la matière organique comptait pour
3,7 % du sol où on alternait la culture du blé et la jachère, 4,9 % du sol
dans le cas d'une séquence blé-blé-jachère, 4,7 % du sol dans le cas d'une
séquence .blé-blé-blé-jachère et 7,2 % du sol dans le cas d'une culture
continuelle de blé dans l'horizon Ap d'un chernozème noir. Des observations
similaires ont été enregistrées également dans l'est du Canada. Par exemple,
Martel et Deschenes (1976) font observer que comparativement aux sols des
prairies enherbées, des sols adjacents au Québec cultivés depuis 30 ans ont
perdu jusqu'à 54 % du carbone organique et 51 % de l'azote total, alors que
les agrégats résistants à l'action de l'eau ont diminué de 50 à 84 %. Dans le
but de stopper ces pertes excessives de matière organique, les auteurs du PFRA
(1983) recommandent : 1) la réduction des jachères; 2) les cultures prolongées
- 49 -
ou continues; 3) la réduction du travail du sol ou l'adoption de systèmes sans
travail du sol et 4) l'inclusion de graminées et de légumineuses dans la
séquence de culture.
Il ressort clairement dans la documentation que les pratiques
agricoles actuelles sont responsables d'une perte importante de la matière
organique dans les sols au Canada. Cette perte continuelle de matière
organique a de graves conséquences sur la qualité du sol. Lorsque sa
concentration en matière organique diminue au-dessous d'une certaine valeur
minimale, le sol ne peut pas remplir les nombreuses fonctions signalées dans
le présent rapport. Les répercussions sur la production agricole sont assez
évidentes : détérioration des propriétés chimiques et physiques, diminution
des réserves nutritives et augmentation des coûts de production agricole.
3.2.2 La matière organique du sol et la capacité d'échange cationique
La matière organique dans la plupart des sols minéraux compte pour 30
à 65 % de la capacité d'échange cationique du sol (Campbell, 1978). Plus la
matière organique est humifiée, plus sa capacité d'échange cationique est
élevée. La capacité d'échange cationique de la matière organique du sol est
beaucoup plus élevée que celle des minéraux argileux. Martel et Lavadière
(1976) ont déterminé la capacité d'échange cationique des horizons Ap des sols
podzoliques et gleysoliques au Québec. La capacité d'échange cationique de la
matière organique était de 161 ± 45 meq/100 g dans ces échantillons et de 29,6
+ 6 meq/100 g dans le cas de constituants argileux. Des résultats similaires
ont été obtenus pour l'horizon Ap des sols chernozémiques en Saskatchewan,
soit 214-223 meq/100 g pour la matière organique et 56-57 meq/100 g pour
l'argile (St. Arnaud et Sephton, 1972).
3.2.3 Pouvoir tampon de la matière organique du sol
La majeure partie du pouvoir tampon du sol provient de ses
constituants colloïdaux, c'est-à-dire la matière organique et les minéraux
argileux. La résistance au changement de pH, faible dans les sols sablonneux,
est élevée dans les sols organiques et à texture fine. Sans ce pouvoir tampon
du sol, le pH augmenterait beaucoup et la pression osmotique varierait de
façon importante sans compter que les cultures de même que les organismes
pourraient subir des dommages car l'activité biologique du sol produit
constamment des acides et des bases. En outre, l'addition d'engrais, de
pesticides et d'autres amendements du sol produit des effets semblables.
3.2.4 Pouvoir de la matière organique du sol de former des complexes
avec les métaux
La formation de complexes avec des ligands organiques solubles
augmente de façon importante la stabilité des éléments de transition en
solution. En l'absence de tels ligands naturels, ces éléments seraient
transformés en des formes insolubles par hydrolyse ou seraient adsorbés sur
des surfaces minérales ou organiques dans le sol. Les éléments Fe, Mn, Co, Cu
et Zn subissent l'hydrolyse dans les conditions qui régnent dans les sols
(Linehan, 1985). L'hydrolyse du Fe et du Cu en des formes insolubles, que les
- 50 -
plantes ne peuvent pas assimiler, est susceptible de se produire dans la
plupart des sols. L'hydrolyse du Mn, du Co et du Zn en des formes insolubles
et non assimilables n'est importante que dans les sols neutres ou alcalins.
Les substances hydrolysées sont également importantes car elles peuvent
s'adsorber sur les surfaces solides. Le ligand le plus efficace dans le sol
est l'AF qui peut former à la fois des complexes métalliques solubles et
insolubles dans l'eau, selon le pH, le ratio métal :AF et la force ionique
(Schnitzer, 1978). La teneur d'un sol en matière organique totale est
importante pour les oligoéléments car elle détermine la dimension du réservoir
d* oligoéléments liés et immobilisés. À mesure que la matière organique est
minéralisée, les oligoéléments sont libérés sous des formes que les plantes
peuvent assimiler. Par ailleurs, une teneur très élevée en matière organique
peut causer des problèmes car le taux de libération des métaux peut être trop
lent pour donner une agriculture productive. Il serait très important dans ce
contexte d'avoir une concentration relativement élevée d'AF en solution dans
le sol pour maintenir une quantité suffisante de métaux, y compris les
oligoéléments, sous des formes assimilables par les plantes. On peut y
parvenir en ajoutant périodiquement au sol de la matière organique fraîche ou
compostée.
3.2.5 Interactions entre la matière organique et les pesticides
La persistance, la dégradation, la biodisponibilité, la lessivabilité
et la volatilité des pesticides sont des propriétés directement reliées à la
nature et à la concentration de la matière organique dans un sol en
particulier (Khan, 1978). Les pesticides peuvent s'adsorber sur la matière
organique et être retenus par des forces de van der Waal, des liens
hydrophobes, des ponts hydrogène, des transferts de charge, des échanges
d'ions et des échanges de ligands. La dose à laquelle un pesticide adsorbable
doit être appliqué sur un sol peut varier d'un facteur de 20, selon la nature
du sol et, dans une large mesure, selon la matière organique qu'il renferme
(Stevenson, 1982). La matière organique peut favoriser la dégradation non
biologique des pesticides et peut également se lier fortement à des résidus
issus d'une dégradation chimique et microbienne partielle des pesticides. Ces
processus peuvent jouer un rôle important dans la détoxication et la
protection de l'environnement. Les sols accumulent continuellement des
quantités croissantes de résidus de pesticides qui peuvent se retrouver dans
l'organisme des invertébrés, l'air ou l'eau, être adsorbés par les plantes ou
dégradés en d'autres produits (Khan, 1980). Une partie des résidus de
pesticides n'est pas extraite par les solvants polaires et non polaires et
semble être fixée solidement à la matière organique, notamment aux substances
humiques. Certains de ces résidus liés peuvent contenir des molécules de
pesticides intactes qui, une fois libérées, peuvent produire des effets
biologiques néfastes. Par ailleurs, la forte affinité de certains pesticides
pour la matière organique peut représenter une méthode sûre de
décontamination. En connaissant les conditions dans lesquelles les
persticides réagissent avec la matière organique, on peut les utiliser de
façon plus rationnelle et efficace et réduire au minimum leurs inconvénients.
- 51 -
3.3 Effets biologiques de la matière organique du sol
3.3.1 Le sol est un milieu vivant
La lente minéralisation de la matière organique opérée par les
macroorganismes et les microorganismes dans le sol fournit aux plantes les
nutriments essentiels à leur croissance. Le sol est habité par les organismes
les plus divers : bactéries, champignons, actinomycètes, protozoaires,
levures, algues, vers de terre et insectes. En général, le nombre
d'organismes dans le sol est corrélé positivement avec la concentration de la
matière organique dans les premiers 30 à 40 cm de sol (Henis, 1986). Le
nombre et la composition des microorganismes peuvent varier d'un jour à
l'autre en fonction de l'humidité et de la température, selon que le sol
s'assèche ou s'humidifie, qu'il subit le gel ou le dégel, qu'il se réchauffe
ou se refroidit ou qu'il est soumis à des fumigations. On peut considérer le
sol comme un milieu vivant abritant de nombreux organismes qui respirent
(comme en témoignent la consommation d'Û2 et la libération de CO2),
digèrent les nutriments disponibles, libèrent de l'ammoniac à partir d'acides
aminés et d'azides et produisent de la chaleur en décomposant la matière
organique (Henis, 1986). Les microorganismes du sol jouent un rôle essentiel
dans la formation et la décomposition de la matière organique. Les
microorganismes actifs dans la décomposition de la matière organique du sol
sont hétérotrophes et vivent dans un milieu oligotrophe où les substrats sont
limités. Cela signifie que ces microorganismes vivent continuellement dans un
état de famine. La vitesse de dégradation de la matière organique est
inférieure à la vitesse d'utilisation de ses produits par les plantes et les
microorganismes. Ce qui explique pourquoi rares sont les produits de
dégradation ou de minéralisation qui s'accumulent, même si on a décelé de
faibles concentrations de produits de dégradation tels des alcools et des
acides organiques.
3.3.2 Renouvellement de la matière organique et de la biomasse
Jenkinson et Rayner (1977) ont publié un modèle qui rassemble des
données recueillies pendant des années sur la vitesse de renouvellement de la
matière organique dans des expériences classiques effectuées à Rothamsted. La
matière organique est séparée en cinq compartiments : la matière végétale
décomposable (MVD, demi-vie de 0,165 années); la matière végétale récente
(MVR, 2,31 années); la biomasse du sol (BIO, 1,69 années); la matière
organique stabilisée physiquement (MOP, 49,5 années) et la matière organique
stabilisée chimiquement (MOC, 1 980 années). Un apport unitaire de matières
végétales (1 t de carbone provenant de matières végétales fraîches par hectare
par année) dans des conditions d'équilibre donne dans le sol après 10 000 ans,
selon le modèle, 0,1 t de carbone dans la MVD, 0,47 t de carbone dans la MVR,
0,28 t de carbone dans la BIO, 11,3 t dans la MOP et 12,2 t dans la MOC.
L'âge déterminé par la méthode au C^ est de 1 240 ans. La concordance
entre la valeur prévue et la valeur mesurée est suffisamment bonne pour
indiquer que le modèle représente réellement la vitesse de renouvellement de
la matière organique dans des sols soumis à la culture. Après 10 000 ans, la
répartition du carbone dans les cinq fractions est : 0,41 % dans la MVD;
1,94 % dans la MVR; 1,15 % dans la BIO; 46,58 % dans la MOP et 50,29 % dans la
MOC. La MVD est considérée comme la composante végétale qui se décompose
facilement, la MVR représente les structures végétales lignifiées qui sont
- 52 -
plus résistantes, la BIO constitue la partie vivante de la matière organique,
la MOP représente de la matière organique vieille de 10 à 100 ans et la MOC,
de la matière organique très ancienne. À long terme, aucune fraction ne
résiste à la décomposition. Ce processus par lequel s'enregistrent
simultanément des pertes et des gains s'appelle le renouvellement, que l'on
peut définir également comme le flux de carbone organique dans un volume donné
de sol. La vitesse de renouvellement est la quantité de carbone dans un sol à
l'équilibre divisé par l'apport annuel de carbone dans ce système (Jenkinson
et Rayner, 1977).
La biomasse de sol constitue environ 2 % de la quantité totale de
carbone organique dans le sol (Jenkinson et Rayner, 1977) et comprend des
bactéries, des champignons, des actinomycètes, des protozoaires, des algues et
la microfaune. Cela ne comprend habituellement pas les racines des plantes et
la faune mesurant plus de 5 x 10^ um^ comme les vers de terre (Sparling,
1985). La plus grande partie de la biomasse est normalement inactive, parce
que limitée en éléments nutritifs. L'addition de substrats organiques
assimilables dans le sol augmente l'activité microbienne et la biomasse. La
principale source de substrats organiques est la litière formée par les
racines, les feuilles et les tiges des plantes et les substances qui exsudent
des racines. Les champignons forment un constituant majeur de la biomasse.
La biomasse ne représente qu'une petite partie de la matière organique totale
mais, comparativement aux autres constituants, elle est labile et remplit de
multiples rôles dans le sol. Elle a un effet sur la décomposition et le
renouvellement de la matière organique, l'immobilisation et le recyclage des
éléments nutritifs, de même que sur la physiologie des racines et la structure
du sol.
Même si la biomasse constitue tout au plus 2 % de la matière
organique, Jansson et Persson (1968) estiment que, dans les sols suédois,
environ 15 % de la matière organique peut être classée comme «active» ou
«labile». Ils croient que c'est la quantité de matière organique
«active» qui a un effet déterminant sur la fertilité du sol et qui
caractérise l'impact qu'a l'agriculture sur l'environnement. La valeur
proposée par Jansson et Persson (1968) est à peu près égale à la concentration
des biopolymères (glucides, composés aminés et bases des acides nucléiques)
dans la matière organique (Schnitzer, résultats non publiés).
3.3.3 Effets physiologiques de la matière organique dans le sol
En laboratoire, les substances humiques peuvent influencer
favorablement la croissance des plantes supérieures, comme on peut le mesurer
par l'augmentation de la longueur, du poids frais et sec des pousses et des
racines et même par l'augmentation du nombre de racines secondaires et de
fleurs (Vaughan et Malcolm, 1985; Rauthan et Schnitzer, 1982). Les substances
humiques peuvent également influencer la croissance de microorganismes divers
comme les algues, les dinoflagellés, les bactéries et les levures. Les effets
précis dépendent de la nature de la substance humique, de sa concentration, de
la composition et du pH du milieu de croissance, des conditions de culture et
de l'espèce végétale étudiée. Les substances humiques ont des effets directs
et indirects. Par exemple, l'AH ou l'AF pourraient avoir un effet direct sur
- 53 -
la synthèse des protéines ou sur les réactions photochimiques dans les
plantes. Pour ce faire, l'AH ou l'AF devraient être absorbés par la plante;
jusqu'à maintenant, on a observé uniquement l'absorption d'AH de bas poids
moléculaire au niveau des racides des plantes et peu de translocation
jusqu'aux pousses. La formation d'un complexe avec un cation, empêchant sa
précipitation, serait un exemple d'effet indirect de l'AF. À l'heure
actuelle, la participation des substances humiques dans des réactions
physiologiques en champs doit faire l'objet de recherches plus poussées.
4.1 Concentration idéale de matière organique dans le sol
Comme il en a été question précédemment, les quantités de matière
organique présentes dans les sols continuent à diminuer à cause des pratiques
culturales actuelles. Les concentrations d'équilibre diminuent sans cesse.
Il n'est donc pas possible à l'heure actuelle de prédire la concentration
idéale de matière organique pour un sol ou un système d'agriculture donné. En
Grande-Bretagne, où la teneur en matière organique a atteint les
concentrations d'équilibre dans certains sols, des estimations de l'effet des
méthodes culturales modernes sur la fertilité et la structure des sols ont été
faites à la fin des années 1960. Les chercheurs ont conclu (Newbould, 1982)
que la matière organique du sol contribuait à en déterminer la fertilité et
exerçait une influence marquante sur la structure dans les sols instables (qui
croit-on renferment de grandes quantités de sable fin, de sable très fin ou de
limon et dont la teneur en matière organique serait inférieure à 3 %) . Une
concentration minimale de 3 % de matière organique a été considérée comme
étant essentielle pour qu'un sol sableux soit productif. L'auteur n'a pu
trouver dans la documentation qu'un seul exemple de concentration minimum de
matière organique valable pour les sols canadiens : c'est la teneur de 5 %
proposée par Côté (1980) et rapportée par de Kimpe (1986). Bien qu'il
n'existe pas de concentrations de matière organique minimales précises à
l'heure actuelle, ces concentrations peuvent être maintenues ou même
augmentées lentement par l'utilisation de graminées et de légumineuses,
l'ajout de paille avec les fertilisants et des applications de fumier de ferme.
4.2 Travaux de recherche futurs
Au cours de la rédaction du présent rapport un certain nombre de projets
de recherche se sont imposés, dont les principaux sont :
1. Caractérisation et identification des formes organiques inconnues
de N, P et S, qui renferment une grande partie de ces éléments sous des formes
disponibles pour les plantes;
2. Caractérisation et identification des agents de liaison organiques
responsables de la formation des agrégats de sol;
3. Mise au point de méthodes de détermination quantitative de la
biomasse et de la matière organique du sol «active» ou «labile».
4. Cueillette de renseignements sur la dynamique de la décomposition
de la matière organique du sol, notamment la vitesse de renouvellement de la
biomasse.
- 54 -
5. Détermination des concentrations minimales de matière organique du
sol nécessaires pour le maintien d'une bonne structure et d'un rendement élevé.
6. Évaluation de l'effet de la culture sans travail du sol sur la
biodynamique de la matière organique du sol.
5. Résumé
1. La matière organique du sol exerce des effets physiques, chimiques
et biologiques sur la qualité du sol parce qu'elle sert d'agent d'amendement,
de source d'éléments nutritifs et de substrat pour l'activité microbienne.
2. La matière organique du sol contribue au maintien d'une structure
adéquate et stable; en effet, elle sert d'agent de liaison dans la formation
d'agrégats, et ainsi assure un drainage et une aération appropriés, protège
contre l'érosion, améliore les propriétés mécaniques et joue un rôle important
dans la rétention de l'eau.
3. La matière organique du sol est à la fois une source et un
réservoir de N, P et S et des oligoéléments essentiels à la croissance des
plantes. La matière organique forme des complexes avec de nombreux métaux qui
deviennent alors disponibles pour les plantes et les microbes et tamponne les
sols (protection contre toute variation marquée du pH) . La matière organique
du sol interagit également avec les pesticides et aide à leur dégradation et à
leur détoxification.
4. La matière organique du sol sert de sites de rétention pour les
micro et macro-éléments nutritifs du sol. Les oligoéléments jouent un rôle
important dans la formation et la décomposition de la matière organique. La
matière organique peut également exercer un impact physiologique direct sur la
croissance des plantes.
5. Toutes les propriétés de la matière organique du sol énoncées
ci-dessus exercent un impact sur la qualité du sol et illustrent le rôle vital
que joue la matière organique du sol sur la fertilité de ce dernier.
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- 58 -
QUELQUES COMMENTAIRES SUR LA PERTE OU L'ACCUMULATION DE MATIÈRE
ORGANIQUE DANS LE SOL ET EFFETS SUR LA QUALITÉ DES SOLS
S. P. MATHUR
Cet article consiste principalement en un résumé des conclusions
provisoires et des recommandations qui découlent d'une revue de la
documentation pertinente, d'une lecture attentive du rapport de M. Schnitzer
portant sur la matière organique du sol en relation avec la qualité du sol,
d'observations personnelles et d'entrevues.
Les pertes en matière organique dans un sol
La mécanisation de l'agriculture a entraîné la disparition, dans beaucoup
de fermes, des bestiaux et des engrais verts, deux facteurs qui contribuaient
à l'enrichissement des sols en permettant de maintenir ou de rétablir les
quantités de matière organique dans le sol. Mais on pensait alors que cette
modernisation qui s'accompagnait d'une utilisation accrue des éléments
fertilisants, en augmentant la production de la phytomasse, permettrait
d'augmenter la quantité de matière organique fraîche incorporée aux sols sous
forme de résidus de culture. La culture du maïs d'ensilage ou des plantes
sarclées produit cependant très peu de résidus de culture. De plus, la paille
des céréales se décompose très lentement et à moins qu'il y ait fertilisation
avec de grandes quantités de NPK ou de N, l'utilisation de la paille comme
amendement peut produire dans les cultures des problèmes de toxicité et de
carence en N. Ainsi, dans les endroits où les conditions climatiques
constituent une contrainte importante, les agriculteurs qui ont de faibles
marges de profit brûlent souvent la paille dans les champs, comme c'est le cas
dans les Prairies canadiennes. Cette pratique a aussi d'autres effets
néfastes dont l'élimination des effets bénéfiques des résidus de culture sur
l'infiltration de l'eau.
Certaines études réalisées antérieurement semblent indiquer que les
rendements des cultures ayant reçu des amendements en fumier n'étaient pas
très différents des rendements des cultures ayant reçu une fertilisation NPK
complète, même si les amendements en fumier permettent parfois de maintenir
des niveaux de concentration en matière organique supérieurs. À long terme,
cependant, la situation est différente, particulièrement depuis que des
variétés à haut rendement et pouvant utiliser plus efficacement la
fertilisation azotée ont été introduites.
On s'attendait à ce que, avec l'avènement des pratiques culturales
modernes, les taux de matière organique du sol dans les climats tempérés
tendent à atteindre de nouveaux niveaux d'équilibre déterminés par le type de
système de culture, de climat et de sol. Pour un système et un lieu donnés,
les niveaux d'équilibre décroissent dans l'ordre suivant : NPK et fumier de
ferme ou résidus de culture seulement; fertilisants NPK seulement; pas de N
mais fertilisants PK ou fumier de ferme ou résidus de culture; et jachère.
La supposition tacite suivant laquelle un nouveau niveau d'équilibre est
atteint et maintenu a été infirmée par les résultats de certaines études
portant sur de plus longues périodes. Par exemple, des données provenant de
3,67
3,88
1,91
1,81
2,60
2,33
3,32
2,56
2,72
2,50
- 59 -
la Suède (tableau 1) ont montré que les taux de matière organique continuent
de décroître même dans les sols qui ont été cultivés pendant plusieurs
décennies. (Newbould, 1982).
Tableau 1
Modifications de la teneur totale en matière organique (% C organique)
en fonction du temps dans des sols en Suède
Année de la première Année de la détermination
culture 1935 1970
Jamais
1600
1855
1880
1910
Dans les Prairies américaines et canadiennes où la culture des céréales a
été effectuée sans rotation à partir d'environ 1900 jusqu'à 1935, sans ajout
d'éléments fertilisants et sans incorporation de résidus de culture dans les
sols, et où les rotations jachère/céréales permettant de conserver l'humidité
ont été pratiquées à partir de 1937 afin d'étudier l'effet de l'érosion
éolienne sur les sols arides, les taux de matière organique du sol ont diminué
d'environ 50 %, c'est-à-dire qu'ils sont passés de 1,7 à 0,9 % C. En outre,
environ 1,58 % de l'azote des 14 premiers centimètres du sol est «perdu» à
chaque année, tandis que les horizons plus profonds perdent moins d'azote. Il
en résulte que les rendements commencent à diminuer.
On peut se faire une meilleure idée de la situation avec les sols sableux
utilisés pour les cultures en rang. La culture des pommes de terre dans l'Est
du Canada en est un exemple. La diminution des taux en matière organique du
sol est suffisamment importante pour entraîner des pertes de rendement et pour
accroître les besoins en irrigation, laquelle aggrave en retour les pertes en
éléments nutritifs, causant ainsi une réduction des marges de profit.
Rétablissement de la matière organique du sol
Les amendements en engrais verts dans les sols sableux utilisés pour la
culture de la pomme de terre au Canada ne semblent pas être en mesure de
maintenir ou de rétablir les taux de matière organique du sol à un niveau
acceptable. Il est donc difficile d'être en désaccord avec les Européens qui
affirment que même si les taux de matière organique peuvent être
progressivement augmentés grâce aux engrais verts, à l'incorporation des
résidus de culture conjuguée avec l'ajout d'éléments fertilisants et à
l'utilisation de grandes quantités de fumier de ferme, il n'est pas indiqué de
recommander aux agriculteurs d'adopter de nouvelles pratiques qui auraient
pour effet de réduire leurs marges de profit. Toutefois, certains résultats
récents apportent une lueur d'espoir. Janssen (1984) a évalué l'efficacité
relative de différents types de matière organique en ce qui a trait à
l'augmentation de la quantité d'humus dans le sol. Ses résultats sont résumés
au tableau 2.
- 60 -
Tableau 2
Évolution du taux de matière organique dans le sol après incorporation de
différents amendements
Type Nombre d'années après l'incorporation Âge apparent
d'amendement 0 13 4 8 initial
(%) (Années)
Engrais vert 100 20 7 4,5 3 0,99
Paille 100 38 18 14,0 10 1,41
Litière 100 57 34 23,0 14 2,28
Fumier de ferme 100 60 33 25,0 19 2,45
Sciure de bois 100 75 54 40,0 27 3,69
Tourbe A 100 85 71 61,0 51 5,47
Tourbe B 100 96 90,5 86,5 82 13,62
Tandis qu'un engrais légèrement décomposé peut avoir un âge apparent
initial de 2,5 années et se décomposer assez rapidement, un fumier de compost
«biostable» peut avoir un âge apparent de 3,5 ou 4 années. Ce tableau
laisse entendre que les meilleurs amendements organiques seraient la tourbe,
les déchets de bois ou les fumiers composés, lesquels, une fois incorporés
dans le sol, ne sont pas minéralisés trop rapidement.
À cet égard, le Canada s'avère un pays riche en tourbe et en déchets de
bois. De plus, le rejet des déchets de produits de la pêche et des fumiers,
lesquels sont en grande partie transportés mais restent encombrants, cause
problème dans ce pays.
Des études récentes réalisées par des scientifiques du Centre de
recherche sur les sols (par exemple, Mathur et al. . 1987, 1988) et leurs
collaborateurs montrent que la tourbe peut être utilisée comme milieu de
compostage pour plusieurs types de matière organique tels que les déchets des
produits de la pêche et les lisiers. Un des résultats importants de cette
recherche est que l'inclusion de tourbe et l'utilisation d'un ensemble de
tuyaux de ventilation permettent de préparer des composts de haute qualité en
moins de deux mois sans qu'il y ait utilisation de systèmes coûteux de
retournement, de brassage ou d'aération alimentés en courant.
Une étude récente réalisée en collaboration avec le Centre de recherche
en sylvichimie a montré que l'incorporation de 5 à 10 tonnes de compost à base
de tourbe peut s'avérer économique, ne serait-ce que comme source d'éléments
fertilisants, dans les sols qui produisent des cultures dont la valeur est de
2 000 $ par ha ou plus (par exemple, les pommes de terre et les légumes). Il
peut donc s'avérer possible, au moins dans certains sols, de rétablir ou
d'augmenter les taux de matière organique sans que les marges de profit des
agriculteurs soient amoindries.
- 61 -
Recommandation provisoire
En plus des objectifs proposés par M. Schnitzer, je recommande que l'on
envisage la mise en oeuvre de nouvelles recherches portant sur l'utilisation
de la tourbe comme milieu partiel ou total pour le compostage des lisiers et
des déchets des produits de la pêche, des abattoirs et du secteur forestier
afin d'améliorer la qualité du sol et de l'environnement. Une telle
entreprise aurait aussi pour effet de donner une impulsion au secteur canadien
de la tourbe et permettrait l'établissement d'un nouveau secteur industriel
fondé sur le compostage. Comme cette solution pourrait ne pas s'avérer
appropriée dans les régions où les valeurs de culture sont inférieures à un
certain montant, il faudrait trouver d'autres moyens pour améliorer la qualité
du sol, par exemple des méthodes permettant de conserver les sols et de mieux
gérer les résidus. Il faudrait aussi envisager l'étude de l'effet des
composts de tourbe sur différentes propriétés du sol, sur la structure du sol
et sur l'aptitude des composts à supprimer la toxicité des métaux lourds, à
permettre que les résidus de pesticides rémanents soient métabolisés par
diverses voies métaboliques et à corriger les déséquilibres des éléments
mineurs.
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- 62 -
PROPOSITION D'UN SYSTÈME DE CLASSIFICATION DE LA QUALITÉ
DES SOLS MINÉRAUX POUR LES TERRES ARABLES
C. WANG, D.R. COOTE ET D.F. ACTON
INTRODUCTION
Depuis plusieurs décennies, la volonté d'atteindre une production élevée et
d'améliorer les rendements a poussé, de plus en plus, les agriculteurs à
drainer les terres humides et les marécages, à déboiser les terres en pente
abrupte, à améliorer les terres difficilement cultivables et de faible
rendement, à utiliser de fortes doses de produits chimiques de même que de la
machinerie lourde et à pratiquer la monoculture. Tous ces facteurs ont
contribué à accélérer la dégradation des sols au Canada (Coote, 1980). Il en
a coûté très cher. Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture, des
pêches et des forêts (Sparrow 1984) a signalé que les agriculteurs canadiens
perdaient à cette époque un milliard de dollars en revenus de la ferme à cause
de la «dégradation des sols». Évidemment, cette perte de un milliard de
dollars par année s'ajoute aux dommages causés à l'environnement, comme la
pollution des rivières, des lacs et des eaux souterraines attribuable à
l'érosion des sols et à l'utilisation de doses massives de produits
chimiques. Ce montant n'inclut pas non plus les dommages écologiques comme la
destruction de lieux de reproduction pour les animaux sauvages causée par le
drainage des terres humides et des marécages.
Certains sols, comme les sols en pente raide, le sols peu fertiles ou ceux
dont la couche d'enracinement est peu profonde, sont difficilement rentables
parce que la mise de fonds nécessaire pour améliorer ces sols et leur
permettre d'avoir une production soutenue est trop élevée. C'est pourquoi
l'aptitude d'un sol à produire un bon rendement année après année moyennant
une mise de fonds raisonnable apparaît comme une des caractéristiques
importantes d'un sol de bonne qualité.
Le prix des céréales sur le marché mondial a connu d'importantes fluctuations
ces dernières années et il est fort probable qu'il en soit de même à
l'avenir. C'est pourquoi la polyvalence des terres, permettant aux
agriculteurs de s'adapter aux conditions du marché en produisant les récoltes
qui rapportent le plus, peut constituer un facteur important pour assurer la
prospérité d'une entreprise agricole.
CRITÈRES
Il découle des considérations précédentes qu'un système de classification de
la qualité du sol pour les terres arables devrait être fondé non seulement sur
la «productivité» de la terre mais aussi sur la «durabilité» de son
utilisation, aussi bien du point de vue économique que du point de vue de la
qualité environnementale, de même que sur la «polyvalence» de la terre,
c'est-à-dire de sa capacité de produire différents types de récolte.
L'utilisation de critères tels que la polyvalence, la productivité et la
durabilité des sols pour classer l'aptitude des sols (ou leur qualité) à la
- 63 -
production agricole n'est pas nouvelle. Par exemple, l'Inventaire des terres
du Canada (ITC), même s'il ne les mentionne pas spécifiquement, utilise les
facteurs climatiques et les facteurs reliés à la productivité et à la
durabilité des sols pour classer l'aptitude des sols à la production agricole
(ARDA 1965). Cependant, les facteurs climatiques ne sont pas pris en compte
de façon uniforme à l'échelle nationale et les facteurs (ou critères) utilisés
dans le système de classification de l'ITC ne sont pas tous définis
quantitativement. Dans un rapport technique publié récemment et portant sur
la classification des terres selon leur aptitude à la culture arable en
Alberta, Pettapiece (1987) utilise trois sous-classes pour déterminer les
différentes classes d'aptitude. Ces trois sous-classes sont : le climat, le
sol et la forme de terrain. Chaque sous-classe est déterminée indépendamment
et les classes d'aptitude sont déterminées à partir d'une combinaison de ces
trois sous-classes.
Si l'on définit la «polyvalence» comme le nombre de types de culture qu'un
sol peut produire, le climat constitue alors le facteur le plus important en
ce qui a trait à la polyvalence des sols. La forme de terrain (incluant la
pente) est un des facteurs les plus importants en ce qui a trait à la
«durabilité» puisqu'elle est liée à l'érosion. Enfin, la «productivité
du sol» dépend du climat et de la forme de terrain mais aussi de plusieurs
propriétés chimiques et physiques du sol. Ainsi, les raisons qui motivent
l'utilisation de la polyvalence, de la durabilité et de la productivité du sol
comme critères permettant de définir la qualité du sol pour la culture arable
sont identiques à celles qui motivent l'utilisation du climat, de la forme de
terrain et du sol comme critères pour caractériser «l'aptitude des terres»
(Pettapiece, 1987). Bien que le système de classification de Pettapiece ait
été conçu pour 1' Alberta, il peut aussi être appliqué à l'échelle nationale.
Dans ce qui suit, nous proposons un système de classification de la qualité du
sol reposant sur trois composantes caractérisées indépendamment. La
combinaison des trois cotes détermine la classe de qualité du sol. Nous
proposons aussi une autre méthode permettant d'évaluer conjointement la
polyvalence et la productivité.
1ère composante - La durabilité
L'idée qui sous-tend le système de classement présenté ici est que les sols
qui sont très sensibles ou exposés à l'érosion (éolienne ou hydrique) et au
compactage ne pourraient pas soutenir une culture intensive à long terme sans
que leur productivité soit gravement diminuée. On sait que le compactage du
sol peut être corrigé moyennant certains coûts, mais les effets de l'érosion
ne sont pas réversibles. C'est pourquoi l'érosion a plus de poids que le
compactage dans le système proposé. Le choix de la salinité du sol comme
paramètre repose sur le fait qu'une portion de terrain présentant un certain
niveau de salinité sera de moins bonne qualité si le sol reste dans la même
condition. La salinité, tout comme le compactage, est réversible moyennant un
certain coût et a donc elle aussi une importance relative inférieure à celle
de l'érosion. Le risque d'acidification du sol n'est pas inclus puisque le
chaulage permet de corriger facilement ce problème. Même si l'on sait que
certaines régions ne disposent pas actuellement de grandes quantités de pierres
- 64 -
à chaux, nous pensons qu'un sol sujet à l'acidification peut tout de même être
cultivé de façon durable. Les critères de détermination de l'aptitude des
sols à une production durable et des exemples de classes de durabilité sont
donnés ci-dessous.
Critères :
3.
Érosivité attribuable à la
pluie et à la fonte des
neiges (E)
Wischmeier & Smith (1978)
Pente (S)
Forme de terrain (L)
Acton (1978)
Condition
Sous-ii
0-33
1
34-66
2
67-100
3
>100
4
horizontal
1
0-3%
2
4-9%
4
10-15%
8
15-30%
16
horizontal
1
incliné
2
ondulé
2
valonné
3
dorsal
3
découpé
4
moutonné
4
buttes et dépressions
4
abrupt
5
Facteur «C» d'érosion
éolienne (C)
(Comprend le vent, les
précipitations, et la
température)
Lyles (1983)
Texture (G)
(En relation avec
l'érosion éolienne et
hydrique de même
qu'avec le compactage)
Profondeur (R)
0-19
20-39
2
40-59
3
60-79
4
>70
5
loams
1
L-A, L-S
2
A-S, S-L, A-Li, L-S TF,
3
L-Li, Li, S, A
4
> 1 m
1
< 50 cm avant la couche
compacte
2
50-100 cm avant la roche
et la couche cimentée
3
< 50 cm avant la roche
et la couche cimentée
6
- 65 -
Climat et drainage (Y)
(en relation principalement
avec le risque de
compactage)
Chapman et Brown (1966)
ID = Imparfaitement drainé
FD = Faiblement drainé
Salinité (Z) (existant)
aucune restriction 1
zone d'humidité K, L 2
ID, FD dans les zones
d'humidité G, H 2
zone d'humidité M 3
ID, FD dans les zones
d'humidité K, L 3
ceinture du Chinook 3
ID, FD dans la zone
d'humidité M 4
nulle/négligeable 1
0,1-1 % de la superficie
du sol de surface 2
sous-sol 5-15 % 2
sol de surface 1-5 % 3
sous-sol >15 % 3
sol de surface 5-15 % 4
sol de surface >15 % 5
Exemples : Les données apparaissant dans le tableau 1 proviennent d'un fichier
cartographique non publié sur la dégradation des sols dont les cartes ont été
établies à l'échelle 1 : 1 000 000 (Coote) et d'un fichier cartographique sur
la forme de terrain (Shields).
- 66 -
Tableau 1 . Classes de durabilité de quelques polygones de sol au Canada.
Prov
N° R+Rs Pente Forme de terrain Vent Texture Épaisseur Climat Salinité Total Classe
polyES L CG R Y Z
T.-N.
92
3
16
3
2
3
30
4
N.-É.
213
3
2
2
2
2
14
1
Î.-P.-É.
13
3
8
3
3
2
22
3
N.-B.
48
266
3
3
8
2
3
2
2
3
2
2
3
22
16
3
2
QC
40
751
3
2
1
8
1
2
2
4
3
3
13
22
1
3
ONT.
215
14
3
3
8
2
4
2
2
2
1
2
21
14
3
1
MAN.
107
2
2
4
1
1
1
2
14
1
SASK.
51
1
4
4
3
2
1
3
19
2
ALB.
644
694
1
2
2
2
2
2
3
1
4
1
3
2
3
1
19
12
2
1
C.-B.
41
18
La somme des valeurs des sous-indices varie de 8 à 41 . Si l'on tient compte de la situation
géographique des 14 polygones ci-dessus, on peut définir provisoire nt les classes comme suit :
- 67 -
Tableau 2. Limites des classes de durabilité
Somme des sous-indices Classe de durabilité
de durabilité
<15 1 Supérieur
15-19 2 Moyen
20-25 3 Bas
26+ 4 Non durable
Les sols ayant les caractéristiques suivantes sont considérés comme non
durables quant à leur utilisation agricole : a) pente > 30 %; b) substratum
rocheux ou couches cimentées à moins de 20 cm de la surface du sol.
Quand un grand nombre de polygones auront été évalués et après avoir recueilli
l'avis de pédologues de toutes les régions du pays, il est probable que des
modifications seront apportées au système pour ajuster à la fois les valeurs
des sous-indices et les classes de durabilité.
2e composante - La polyvalence
Les critères proposés ici (tableau 3) sont similaires aux sous-classes
climatiques du système de classification de l'aptitude des terres proposé par
Pettapiece (1987). Les catégories d'humidité (A) sont toutefois établies
suivant les sous-classes d'humidité du sol définies dans le système canadien
de classification des sols (Comité d'experts sur la prospection pédologique
d'Agriculture Canada 1987) en fonction des déficits ou des surplus en eau dans
les sols. Les données d'humidité du sol dont nous disposons sont limitées
dans la plupart des régions du Canada. Les sous-classes d'humidité du sol
peuvent être établies en calculant par une méthode simple le bilan hydrique à
partir des données de précipitations mensuelles et du taux
d'évapotranspiration potentielle relatives à la saison de croissance (Baier et
Robertson 1965). La température (H) est caractérisée suivant le nombre de
degrés-jours réels de croissance. Ce critère est meilleur que le nombre de
degrés-jours de croissance parce qu'il prend aussi en compte le fait que la
photopériode est plus longue dans le nord du Canada durant les mois d'été
(Pettapiece 1987). Les limites des classes des facteurs A et H (tableau 3)
sont arbitraires. Elles devront être mises à l'épreuve afin que l'on puisse
établir des limites plus appropriées.
- 68 -
Tableau 3. Critères de détermination des classes de polyvalence des sols*
dans les terres arables.
Humidité (A)
Température (H)
Sous-classe de
régime hygrométrique
Cote de
À
Degrés-jours réels
de croissance
Cote de
H
Perhumide et humide
Sub-humide
Subaquique
Semi-aride
Aquique
Subaride
Peraquique
Aride
Régime aqueux
1
2
3
4
5
6
7
8
Non durable
>
3300
3300
- 2801
2800
- 2301
2300
- 2001
2000
- 1701
1700
- 1501
1500
- 1301
1300
- 1100
<
1100
1
2
3
4
5
6
7
8
Non durable
* Les cotes de l'humidité (A) et de la température (H) sont établies de façon
indépendante, et la valeur la plus basse détermine la classe de polyvalence
du sol.
3e composante - La productivité du sol
Les critères utilisés pour estimer la productivité du sol pour les cultures
arables sont présentés au tableau 4. Chacun de ces critères sera quantifié à
l'aide d'un sous-indice semblable à celui utilisé pour établir les classes de
durabilité. Ces sous-indices seront déterminés ultérieurement. Nous
prévoyons aussi tester ces critères d'une manière semblable à celle ayant
permis d'obtenir les résultats du tableau 1 afin de déterminer des limites de
classe appropriées pour cette troisième composante. À partir de notre
expérience et des discussions que nous avons eues avec plusieurs prospecteurs
pédologiques, nous avons classé tous les sous-groupes de sol du système
canadien de classification des sols suivant leur productivité (tableau 5). La
cote des sols selon leur productivité est habituellement supérieure à la cote
établie par l'ITC d'après l'aptitude des sols à la production agricole parce
que les facteurs climatiques ne sont habituellement pas pris en considération
dans notre classification des sols selon leur productivité. Le tableau 5
s'avère utile pour déterminer, à l'aide des informations que l'on peut
retrouver dans un fichier où la forme du terrain est caractérisée, la classe
de qualité du sol.
- 69 -
Tableau 4. Critères utilisés pour déterminer la classe de productivité du sol
dans les terres arables.
Facteurs relatifs au sol de surface
0 - 20 cm
Facteurs relatifs au sous-sol
20 - 120 cm
Texture (M)
Structure et consistance (D)
Teneur en carbone organique (F)
Réaction du sol (V)
Teneur en carbonate (K)
Salinité (N)
Pierrosité à la surface (P)
Texture (m)
Structure et consistance (d)
Réaction du sol (v)
Teneur en carbonate (k)
Salinité (n)
Profondeur à laquelle les
racines peuvent se rendre (r)
Drainage (w)
3
O
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5
6
à
8
9
à
11
12
à
14
15
à
16
- 71 -
DÉTERMINATION DE LA CLASSE ET DES SOUS-CLASSES DE QUALITÉ DU SOL
a) Classe de qualité du sol
Les classes de qualité du sol sont déterminées grâce à l'indice de qualité du
sol, lequel représente la somme des cotes des trois composantes mentionnées
précédemment (c'est-à-dire la polyvalence, la durabilité et la productivité du
sol). Si l'une des trois composantes reçoit la cote «inapte», le sol est
automatiquement reconnu lui aussi comme «inapte». En plus de la classe
«inapte», la durabilité et la productivité comportent chacune quatre
classes tandis que la polyvalence est divisée en huit classes. Ainsi,
l'indice de qualité du sol varie de 3 à 16. La relation entre l'indice de
qualité du sol et les classes de qualité est la suivante :
Indice de qualité du sol Classe de qualité du sol
1 supérieur
2 bon
3 moyen
4 bas
5 mauvais
b) Sous-classes de qualité du sol
Les sous-classes de qualité du sol sont utilisées pour indiquer le ou les
facteurs limitants pour chacune des classes de qualité. Un maximum de trois
critères, parmi les critères apparaissant aux tableaux 1,3 et 4, peuvent être
utilisés comme suffixes ajoutés à la classe, ce qui permet ainsi de constituer
des sous-classes. La classe 1 ne comporte pas de sous-classes puisque les
sols de cette classe n'ont pas de facteurs limitants. À titre d'exemple, un
sol ayant reçu la cote 3CA est un sol de classe 3 qui est sujet à l'érosion
éolienne et dont le régime hygrométrique pose certains problèmes.
Une méthode de rechange pour évaluer conjointement la polyvalence et la
productivité des sols.
Dumanski et al. (1988) ont utilisé l'équation suivante pour obtenir un indice
de polyvalence des terres (Physical Land Flexibility Index, PLF) dans la
région des Prairies canadiennes.
n
PLF = I Si Yi/Ymi
i=l
où Si = portion de l'unité cartographique apte à produire la
culture i (%);
Yi = rendement potentiel attendu de la culture i exprimé en poids
frais (kg ha~l)
Ymi = rendement maximum attendu de la récolte i exprimé en poids frais
(rendement potentiel) dans la zone d'étude (kg ha--'-);
n = nombre de récoltes utilisé pour les analyses
- 72 -
Des indices PLF ont été calculés pour la région des Prairies en prenant en
considération huit récoltes (blé de printemps, maïs, soya, haricot, orge,
avoine, canola et tournesol). Après avoir comparé les résultats obtenus avec
cette formule avec ceux obtenus par l'évaluation des sols et du climat,
Dumanski et al. (1988) sont arrivés à la conclusion que les indices PLF sont
supérieurs pour évaluer la polyvalence des terres. Cela est dû au fait que le
rendement (ou la production) se trouve intégré dans cet indice en plus des
paramètres liés au sol et au climat. La prise en compte du rendement permet
de mieux pondérer les effets du sol et du climat sur la polyvalence des sols.
CONCLUSION
Les indices PLF constituent potentiellement le meilleur critère pour évaluer
la polyvalence des sols à l'échelle nationale. Pour l'instant, les indices
PLF ont été calculés seulement pour la région des Prairies. L'évaluation de
ces indices pour tous les sols cultivés au Canada devrait être une priorité
importante dans tous les projets visant à déterminer la qualité des sols et à
évaluer les terres. Si les indices PLF s'avèrent appropriés pour évaluer la
polyvalence des sols, la troisième composante utilisée pour déterminer la
qualité des sols (la productivité) pourrait ne plus être utile parce que ces
indices tiennent compte du climat et de la productivité.
RÉFÉRENCES
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canadien de classification des sols. Commission canadienne de pédologie,
1978. Publication 1646 du ministère de l'Agriculture du Canada. 170 pp.
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simple weather observation. Can. J. Plant Sci. 45: 276-284.
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